Le gouvernement Selom Komi Klassou est-il un repaire d’individus indélicats ? Un ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat qui se met en intelligence avec un acquéreur véreux pour accaparer un domaine foncier affecté à un établissement scolaire, cela sort de l’entendement.

Le corrompu ministre togolais de l'urbanisme et de l'habitat Fiatuwo Sessenou | Infog : 27avril.com
Le corrompu ministre togolais de l’urbanisme et de l’habitat Fiatuwo Sessenou | Infog : 27avril.com

Et pourtant c’est le scénario rocambolesque que vivent actuellement les populations de Segbé, obligées de se mobiliser contre les manoeuvres de Fiatuwo Sessenou et d’un certain Agokpa Nouaké Vignon qui, cherchent à s’accaparer du terrain de sport du CEG Ségbé.

L’indélicat ministre qui avant de se retrouver au gouvernement, était l’avocat du sieur Agokpa Nouaké Vignon use aujourd’hui de son statut de ministre pour démembrer le domaine scolaire. Poussant son outrecuidance à son extrême, il s’est permis le 14 avril dernier, accompagné de son acquéreur véreux, de se rendre sur les lieux, papiers à la main, pour délimiter une surface qu’il identifie comme la propriété de son client.

Séance tenante, il convoque le Directeur du CEG Ségbé et celui de l’école primaire pour les informer que le terrain de sport appartient désormais au sieur Agokpa Nouaké Vignon, présent sur les lieux aux cotés de l’indélicat ministre. De cette visite curieuse et scandaleuse d’un ministre de l’Urbanisme qui appuie un ancien client dans l’accaparement d’un domaine scolaire, les deux directeurs du CEG et de l’école primaire, inquiets et soucieux des conséquences que ce gangstérisme pourrait créer à leurs établissements et aux élèves, ont adressé un rapport à l’inspection de l’enseignement préscolaire et primaire de Lomé Ouest.

« Nous avons l’honneur de vous rendre compte de la visite du ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat au CEG Ségbé. En effet le 14 avril 2016, le ministre est arrivé vers 11h 45 accompagné de Monsieur Agokpa Nouaké Vignon. Selon le motif évoqué, il serait venu pour constater l’usage fait du terrain objet de litige entre l’école et son plaignant Agokpa, le présumé propriétaire du domaine scolaire convoité.

Au cours des échanges, il a prétexté que si on léguait 2 hectares à l’école, elle pourrait y implanter toutes les infrastructures, y compris le terrain de sport. Il ressort également des discussions qu’un jugement serait prononcé au tribunal de Lomé en faveur du demandeur dont copie n’a jamais été donnée à l’école », peut-on lire dans le compte rendu des deux directeurs.

Comme il fallait s’y attendre, cette visite et la volonté manifeste du sieur Fiatuwo Sessenou d’user de son titre de ministre pour accaparer le domaine scolaire au profit de son ancien client a révolté les populations de la localité qui sont vent debout et préparent des manifestations. Visiblement, le sieur Fiatuwo Sessenou dont le domicile se trouve sur une voie publique à Kohé est spécialiste du démembrement des domaines scolaires. Après le lycée technique d’Adidogomé dont une partie du domaine a été prise pour un fameux projet de logements sociaux, le voilà qui jette son dévolu sur le terrain de sport du CEG Segbé. Pour permettre aux lecteurs de connaître les dessous de ce nouveau scandale, il est utile de faire la genèse du domaine objet du conflit.

L’école primaire publique de Ségbé a vu le jour depuis les années 1976. Mais compte tenu de l’augmentation de la population, et pour éviter de longues distances aux élèves, un collège y a été créé en 2015. Comment un tel domaine scolaire depuis des décennies peut-il se retrouver une propriété privée d’un individu soutenu par un ministre véreux ?!

L’école avait un domaine de plus de cinq hectares. Ce domaine a été cédé a l’Etat togolais depuis 1976 par trois collectivités à savoir : la collectivité Adekuadi Akoumani Koumani , la collectivité Hededji et la collectivité Agblegan Adibolo toutes propriétaires de terrain à Lomé Aflao Ségbé pour la construction d’une école primaire. En 2005, la collectivité Akoumani représentée par M. Akoumani Boko a commencé par vendre le domaine scolaire. Vingt lots ont été vendus. Par des contorsions, il a réussi à réduire la superficie à quatre hectares treize ares zéro trois centiares (4ha 13a 03ca). C’est cette dernière superficie que le sieur Akoumani Boko a volontairement déclarée et certifiée par un acte de donation en date du 7 juin 2007 dont L’Alternative a reçu copie. Ce contrat de donation avait été signé par le Secrétaire général de la préfecture du Golfe, M. Batazi Abarim Sagbana et M. Yaovi Dzanyi Sédina, chef section propriété foncière à la préfecture du Golfe.

Monsieur Akoumani revient à la charge, en complicité avec des avocats, déclare que son feu père n’avait cédé qu’une superficie d’un hectare. C’est par cette déclaration au Tribunal de Lomé qu’il a réussi à vendre trois hectares sur les quatre restants au sieur Agokpa Nouaké Vignon.

Selon les sources proches du dossier, c’est en 2008 que le sieur Koumani Boccoh qui a bénéficié de la complicité de certains membres de la collectivité Koumani et du sieur Agokpa Nouaké Vignon, est arrivé à vendre le terrain à ce dernier. « Ils se sont servis d’un faux mandat le désignant mandataire de ladite collectivité et ont vendu une partie de l’école au sieur Agokpa, imprimeur de son état », déclare le chef de Segbe.

Il se dit qu’entre-temps, dans leurs manoeuvres, Koumani Boccoh était assisté de Maître Sessenou Fiatuwo qui n’était pas ministre en ce temps a obtenu au nom de la collectivité Koumani le jugement numéro 2186 /09 rendu le 24 juillet 2009 par le Tribunal de Première instance de Lomé confirmant le droit de propriété de la collectivité Koumani sur le terrain objet de l’occupation réelle de l’école.

Auprès des habitants, on apprend qu’une première tentative d’occupation du terrain datant de 2009 avait déjà échoué suite à une intervention des jeunes de la localité. En 2014, le sieur Agokpa Nouaké Vignon a ordonné aux géomètres de faire exécuter des travaux topographiques sur le terrain; les jeunes mobilisés ont chassé les géomètres et leurs matériels ont été saisis par le chef du village de Ségbé, Togbui Ashamou III. Depuis, plus rien jusqu’à ce que le ministre Sessenou et M. Agokpa ne viennent le 14 avril dernier pour négocier auprès du directeur de l’Epp Ségbé. Une démarche scandaleuse, indigne d’un ministre de la République, de surcroit de l’Urbanisme et de l’Habitat. Quelle mouche peut piquer un ministre pour qu’il aille négocier auprès d’un directeur d’école afin que ce dernier cède une partie du domaine de son établissement, notamment le terrain de sport à un acquéreur véreux pour des constructions personnelles?

A ce niveau de responsabilité, comment un ministre peut-il se permettre d’amputer des parcelles d’un domaine scolaire au préjudice de la communauté et surtout des élèves ? Comment peut-on être au gouvernement et s’illustrer par ces méthodes de voyous ? Fiatuwo Sessenou est-il un ministre en fonction qui continue d’exercer son métier d’avocat ? Si c’est le cas, alors nous sommes en face d’un sacré bordel. Pour les habitants de Segbé, la complicité entre le ministre de l’Urbanisme qui fait du trafic d’influences et l’acquéreur véreux n’est plus à démontrer.

Dimanche dernier, des réunions ont eu lieu dans l’enceinte de l’école de Ségbé. Les populations se sont organisées pour dégager un bureau qui devra mener des démarches auprès des autorités compétentes pour connaitre les contours de cette affaire. Quant aux jeunes, ils restent vigilants et mobilisés pour mettre fin aux velléités de ces escrocs du foncier. A suivre !

Source : [13/05/2016] Robert Avotor/ Mensah K, L’Alternative