Les dessous de tables et les pressions de toute sorte du régime de Faure Gnassingbé sur les évêques du Togo, ont poussé ces derniers à rester muets tout au long du processus électoral. Une lâcheté qui ne dit pas son nom | Archives : CET
Les dessous de tables et les pressions de toute sorte du régime de Faure Gnassingbé sur les évêques du Togo, ont poussé ces derniers à rester muets tout au long du processus électoral. Une lâcheté qui ne dit pas son nom | Archives : CET

Cette année et pour la première fois dans l’histoire du Togo, les Evêques n’ont pu publier de message à l’occasion d’un scrutin alors que la situation du pays les y appelle plus que jamais. Manipulations, pressions, dessous de tables… La conférence épiscopale a préféré se taire faute de consensus. Et derrière, la main autrement puissante du régime.

Si le dernier communiqué des Evêques a eu une importante répercussion et une influence politique importante, c’est beaucoup plus par son contenu audacieux que par la tradition devenue norme qui les pousse à se prononcer régulièrement sur la situation politique du pays. Cette audace, certains le paieront. Car une taupe, sans doute l’un d’entre eux a fait le compte rendu, minute par minute de la chronique du dernier communiqué et de façon déguisée ou directe, chaque Evêque a reçu le message proportionnel à la taille de son « opposition » au régime.

Au cours de la conférence plénière qui a donné suite au dernier communiqué, il avait fallu la pression personnelle du Nonce apostolique, ambassadeur du Vatican près le Bénin et le Togo pour arriver à un message consensuel car l’Evêque de Kpalimé et président de la Conférence des Evêques du Togo s’était penché clairement pour le gouvernement. Ce qui est d’autant plus compréhensible puisqu’il est le principal parrain de Ingrid Awadé, puissante femme du régime togolais. Ses autres homologues se sont partagés entre des positions proches de l’opposition et une habile neutralité. On sait par exemple que plutôt hostile au régime quand il était prêtre, Jacques Gaglo a progressivement adouci sa position alors que celui de Lomé, l’Archevêque est très peu politique. Ceux de Sokodé et de Dapaong sont identifiés comme « opposants » et traités comme tels, comme si par le fait d’être à la tête de peuples « contestataires », ils en sont arrivés à en partager la conviction. Celui d’Atakpamé, Nicodème Barrigah qui est en même temps le plus politisé d’entre eux essaie, chaque fois la conciliation. Ancien président de la Cvjr, la commission chargée de faire la lumière sur l’histoire récente du pays et d’accompagner la réconciliation après plusieurs épisodes de violences, il a vu ses recommandations jetées en armoire.

Alors qu’il avait toutes les raisons de prendre position pour le régime, l’Evêque de Kara (fief traditionnel de Faure Gnassingbé) évite de ses prononcer lors des plénières. Calme et malin, il préfère ne pas faire de ses convictions politiques une arme de combat, reconnaît un prêtre proche de lui. Faure Gnassingbé s’était remonté contre une église de plus en plus politique. « Les méthodistes sont avec l’ANC, si les catholiques aussi s’alignent, on fera comment nous ? » s’emporte un proche du président togolais qui y voit « une influence par l’instrumentalisation de la foi ». Depuis et selon plusieurs sources, « pressions n’ont jamais été aussi fortes » et la conséquence fut immédiate, les Evêques font se terrer dans le silence pour ce scrutin.

Influente en Afrique, l’Eglise reste une voix au service des pauvres. Dans la plupart des pays qui ont connu une transition démocratique dans les années 1990, Zaïre, Bénin, Congo, Togo etc…, des Evêques ont joué un rôle important. Le cardinal congolais (RDC) est devenu pour toute l’Afrique, le symbole de la lutte contre les dictatures et l’assume.

Source : [17/04/2015] Carmel Max-Savi, Afrika Express

Titre : 27avril.com