Wacem SNPT Togo, compagnies esclavagistes au Togo
Wacem SNPT Togo, compagnies esclavagistes au Togo

Petit territoire aux grands atouts naturels, le Togo n’est pas pauvre. Pour s’en convaincre, il faut tout simplement visiter notre sous sol. Si entre autres, le phosphate, le calcaire, le fer, l’or, le diamant et le Marbre sont en voix d’extraction, l’avenir du sous sol togolais est aussi fait de pétrole et de bien d’autres minerais. Mais dans la gestion d’une Nation, une chose est d’avoir un vent favorable, l’autre chose est de savoir où l’on va. L’autorité togolaise ne sait pas où elle va. De ce fait, les richesses minières sont devenues un obstacle, un cancer qui ronge les populations.

Avant de se retirer du secteur pétrolier du Togo par une lettre en date du 29 janvier 2014 suite au « non respect par le gouvernement de ses engagements », si les prospections de la Société ENI ont confirmé l’existence du pétrole, l’exportation de l’or, quant à elle, vient en troisième position avec 17% des exportations minières bien que ce business baigne dans une opacité totale quand on sait qu’aucun champ aurifère déclaré n’est connu jusqu’ici. Le secteur extractif au Togo, c’est 22% des exportations nationales, 4% des recettes nationales et 4% du PIB selon le rapport ITIE-Togo 2012, Initiative pour la transparence dans les Industries Extractives.

Sur fond d’une exploitation de l’homme par l’homme, si la gestion du sous sol togolais végète dans une opacité éloquente, les secteurs les plus alarmants restent, sans commune mesure, l’exploitation du phosphate et du calcaire. Ils sont les deux premiers minerais en tête de pelletons avec respectivement 46 et 37% des exportations minières à la lumière du même rapport. Si le phosphate de Hahotoé est évalué à plusieurs dizaines de millions de tonnes, le calcaire de Tabligbo reste un vaste champ non quantifié. Le business minier commence d’abord par une autorisation de prospection, ensuite un permis de recherche et en fin un permis d’exploitation, voici les trois étapes à remplir par les hommes d’affaires pour s’installer au Togo.

Citerne de Wacem éventré par une explosion qui a tué au moins 5 personnes à Tabligbo | Wayena
Citerne de Wacem éventré par une explosion qui a tué au moins 5 personnes à Tabligbo | Wayena

WACEM et la SNPT ont pu se faire signer des permis d’exploitation à grande échelle, mais quelle gestion font-ils de leurs capitaux naturels et humains ? Le récent drame à Tabligbo avec ses 6 morts est symptomatique de la façon villageoise dont se gère le capital humain dans nos entreprises minières. Quand de tels drames surviennent après que la presse ait relayé à plusieurs reprises le désarroi que vivent les agents dans les champs miniers, il y a de quoi s’interroger. Le phosphate, extrait à l’échelle industrielle depuis 1961, est totalement togolais depuis sa nationalisation. Depuis 1975, de l’exploitation industrielle du calcaire à sa transformation en clinker pour aboutir au ciment, le Togo est sensé percevoir présentement, conformément aux articles 137 et 102 du code général des impôts, au moins 27% du bénéfice imposable de WACEM. Mieux, à la disposition de l’article 55 du code minier, « le gouvernement prend une participation gratuite de 10% du capitale de l’investissement ». Juste pour vous dire que WACEM, si on se rend compte que l’écrasante majorité de la main d’œuvre est de surcroit togolaise, n’est pas seulement une affaire d’expatriés qui exploitent un champ minier. Mais le Togo y joue un rôle clé avec des « dividendes » conséquentes.

Que fait l’autorité, l’inspection du travail entre autres, pour jouer son rôle au chevet de l’exploitation des ouvriers ? Rien, et pourtant, WACEM est le prototype de l’esclavage des temps modernes avec la complicité active des autorités. Les dirigeants semblent faire de ses populations un bouclier pour protéger leurs intérêts et ceux des exploitants. Le Salaire Minimum Inter Garantie au Togo est de 35000 F CFA. C’est dire que l’ouvrier le moins lotis devait au moins toucher ce montant à WACEM. Paradoxale que cela puisse paraître, « le salaire le plus bas pratiqué est de 20.000F ». C’est ici que se confirme l’exploitation de l’homme par l’homme, le pire est que, d’après nos informations recoupées auprès d’anciens employés de la boîte, un monsieur supervise un circuit occulte de prélèvements sur salaire depuis la source. Ainsi, tout employé de WACEM doit souffrir que son salaire soit amputer de 15 000 F CFA chaque fin de moi sans autre forme de procès par des individus inconnus. C’est d’ailleurs la première condition pour être employé et l’une de nos sources nous a confirmé avoir démissionné pour mésentente au sujet de cette retenue indue qui l’obligeait, à chaque mensualité, à se contenter de 60 000 FCFA au lieu de 75 000.

Pour revenir à la récente actualité, comment peut-on comprendre que, dans une usine qui dit respecter les normes internationales, l’on entreprenne de souder une cuve de trois milles litres de substance sensible au feu pendant que celle-ci est encore remplie ? Aucune disposition sécuritaire n’étant prise avant l’intervention de l’unité de soudure, la chaleur a fait explosée la cuve. Cette aventure a accouché de six morts et la vie continue. En situation normale, la première réaction d’un soudeur qui doit intervenir sur un réservoir d’essence est de le vider et de le rincer.

WACEM, c’est aussi le travail au noir avec le sulfureux système de tâcheronnat. Les grèves sont récurrentes, et pourtant ça ne change rien. Suite à une grève, M. Kodjovi Sedonou, Secrétaire général Adjoint de Syndémines déclarait : « Nous avons trois principales revendications qui nous ont motivés à entrer en grève. La première concerne les travailleurs contractuels. Il est vrai que la loi a prévu qu’il y ait des tâcherons, mais elle ne prévoit pas qu’un emploi censé être permanent soit confié à un tâcheron. La deuxième est relative à la grille salariale appliquée par Fortia. Notre troisième revendication qui concerne principalement Wacem est la santé des employés ». « Wacem, Fortia et PP Bag exploitent des milliers de travailleurs qui font déjà dix-huit (18) ans dans le service. Mais ils gardent toujours le statut de contractuels ». « Au lieu d’être recrutés comme des permanents, on confie leurs contrats à des tâcherons qui les recrutent, ceci pour éviter de payer un salaire normal. Nous demandons que ces travailleurs soient reconnus comme des travailleurs permanents recrutés par l’employeur principal. A partir du moment où ces emplois sont liés à l’activité normale des usines, il n’est pas question qu’on garde ces travailleurs sous des tâcherons »

De ce qui précède, avec la complicité des textes, cette méthode est juste une façon de décharger les premiers responsables de l’usine de la gestion estimée onéreuse des employés. Ceci n’est-il pas assez pour rappeler à l’ordre WACEM ?

Exploitation de phosphate à Hahotoé | RT
Exploitation de phosphate à Hahotoé | RT

De WACEM à la SNPT il n y a qu’une coude

Deux carrières, mêmes hantises, mêmes drames. Toutes se ressemblent dans leur opacité dans la gestion mais aussi dans le sort réservé au capital humain et le matériel de travail. L’exploitation du phosphate rythme avec les récurrents accidents de travail. La vétusté des installations, la non-protection des employés sur les champs miniers et autres insuffisances sont criardes. Après WACEM, les dernières tristes nouvelles viennent de Hahotoé. Là, ce mercredi 08 juillet au matin, c’est un bulldozer minier qui vient de renverser un pick-up transportant 09 agents de la boîte. Cet engin lourd travail sans frein depuis deux ans malgré les relances des employés. On déplore un mort, trois blaisés graves admis à Afadjan et cinq blessés légers au centre de santé de Vogan. Le matériel de travail à Kpémé, c’est la traversée du désert. Il suffit de visiter les installations pour se convaincre du danger que court l’employer dans un environnement fait de ferrailles coloniales qui continue par vrombir.

Tout comme WACEM, la SNPT, c’est le non-respect des minima conventionnels, le SMIG n’est pas respecté. La protection individuelle du personnel est un vieux rêve, les agents travaillent sans aucune protection sur des sites dangereux comme vient de le démontrer ce récent accident. Les travailleurs réclament vainement depuis un bail leur reclassement. La visite médicale, elle relève d’un luxe disparu depuis plus de dix ans. La SNPT, c’est la gestion opaque dans tous les compartiments. Même la gestion des œuvres sociales souffre de l’absence des délégués du personnel malgré les textes.

Toute activité minière prise en compte, le dialogue sur la convention sectorielle des mines aves les services compétents de l’Etat, les industries extractives et les délégués du personnel, après la première phase, s’est embourbé à la seconde étape. Les employeurs ont tout simplement déserté la table de négociation pour se soustraire de leurs obligations lors qu’il s’est agit de redéfinir les conditions de payement des agents. Ces derniers comptent rentrer en grève si d’ici fin juillet les nouvelles autorités ne se sentent pas interpelées par leurs préoccupations.

Les cuves de la SNPT sont trois fois plus grandes que celles qui viennent de faire des victimes à WACEM. Mais les conditions de travail autour de ces citernes de la mort sont idem. Pour toucher du doigt les réalités dans les deux secteurs, nous vous publions deux mémorandums, l’un de WACEM, l’autre de la SNPT, ce dernier vous a une fois été servi par nos soins.

Source : [09/07/2015] Dossier de Abi-Alfa, Rendez-vous N° 252

Mémorandum de SADD publié le mercredi 16 juillet 2014 sur les conditions de travail et de vie des travailleurs de PAPER BAGS

I. PRESENTATION DE L’ENTREPRISE PAPER BAGS

L’entreprise Paper Bags a été créée il y a huit (08) ans, en 2005 et est spécialisée dans la fabrication des sacs plastiques communément désignés « bafana ». C’est une filiale du grand groupe West African Cement (WACEM), une entreprise d’origine indienne installée en zone franche depuis 1996. A la date du 4 juillet 2013, Paper bags employait 192 travailleurs par le biais des tâcherons (sous-traitants). Il y a des électriciens, des mécaniciens, des conducteurs de machines (opérateurs), des magasiniers, des manœuvres. Les travailleurs ont le niveau BAC, BEPC, CAP. D’autres ont appris des métiers.

II. REGIME JURIDIQUE DU TACHERONNAT AU TOGO

Le tâcheronnat est un régime juridique d’emploi qui consiste pour un sous-entrepreneur à recruter lui-même la main-d’œuvre nécessaire, à passer verbalement ou par écrit avec un entrepreneur un contrat pour l’exécution d’un certain travail ou la fourniture de certains services moyennant un prix forfaitaire.

Ce régime d’emploi fait l’objet d’une réglementation par le Code du travail notamment des articles 79 à 82.

Relativement à ses obligations vis-à-vis des travailleurs/euses, « Le tâcheron est soumis aux mêmes obligations que tout employeur en ce qui concerne l’application de la législation en matière de travail, de main-d’œuvre et de sécurité sociale. »

Pour ce qui est de l’action en responsabilité, le travailleur en cas d’insolvabilité du tâcheron, peut se retourner contre l’entrepreneur, si les travaux sont exécutés dans les magasins ou sur les chantiers de l’entrepreneur. L’alinéa 1er de l’article 80 du Code du travail dispose : « Quand les travaux sont exécutés dans les ateliers, magasins ou chantiers de l’entrepreneur, celui-ci est, en cas d’insolvabilité du tâcheron, substitué à ce dernier en ce qui concerne ses obligations à l’égard des travailleurs. »

Pour rappel, à la date du 10 juin 2013, WACEM conventionne sept (07) tâcherons pour les travaux à la carrière.

Il existe aussi des tâcherons, travailleurs permanents, qui recrutent des travailleurs/euses pour des travaux à l’usine (entretien, ramassage etc.)

Selon les sources, le nombre total des tâcherons serait de 30 personnes (dont entre 3 et 5 femmes).

III. CONDITIONS DE TRAVAIL ET DE VIE DES TRAVAILLEURS/EUSES EMPLOYES PAR LES TACHERONS

  1. Déclaration à la CNSS

Elle est obligatoire pour les employeurs conformément aux dispositions des articles 3,7 et 9 du Code de sécurité sociale, 47 de la Convention collective interprofessionnelle et 76 de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012.

Cependant, aucun travailleur n’est déclaré à la CNSS.

  1. Matériel de protection individuelle

Selon les dispositions des articles 46 de la Convention collective interprofessionnelle et 75 de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012, l’employeur doit mettre à la disposition du personnel exerçant un emploi le nécessitant le matériel de protection approprié (casque, cache-nez, chaussures, gilets etc).
Le travail à l’usine nécessite ainsi le port de casques, de chaussures de sécurité ; mais l’usine ne s’en charge pas malgré les dispositions légales.

Les cache-nez qui sont donnés sont fragiles et inadaptés ; ce qui expose les travailleurs/euses à l’inhalation des gaz et de la poussière.

  1. Le contrat de travail

A la lecture des articles 35 et 36 du Code du travail, la forme du contrat est librement convenue entre les parties.

Les dispositions des articles 7 de la Convention collective interprofessionnelle et 5 de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012 prévoient la validité du contrat de travail verbal.

Cependant, le constat fait est que tous les travailleurs sont liés par des contrats verbaux qui ne protègent pas assez les travailleurs malgré leur validité.

  1. Les heures de travail

Les heures de travail sont de 48 heures à 72 heures par semaine et sont mal déterminées et mal payées en violation des dispositions des articles 142 du Code du travail, 32 de la Convention collective interprofessionnelle et 47 de la Convention collective sectorielle de la zone franche.

Malgré cette réalité, dans les différentes sections, le travail se fait debout et c’est pour quelques minutes que les travailleurs s’asseyent.

Par conséquent, ils souffrent souvent des maux de ventre, de tête, de vertige, de courbatures.
Dans l’usine règne également une chaleur intense.

  1. Le SMIG (Salaire minimum interprofessionnel garanti)

Le SMIG actuel est de 35 000 F conformément à la Convention collective interprofessionnelle et à la Convention sectorielle de la zone franche. Cependant, il n’est pas respecté. En effet, le salaire le plus bas pratiqué est de 20.000F.

  1. Les bulletins de paye

Ils doivent être délivrés à chaque travailleur conformément aux dispositions des articles 129 du Code du travail, 31 de la Convention collective interprofessionnelle et 46 de la Convention collective sectorielle de la zone franche.

Malgré ces dispositions, les salaires sont payés de main-à-main sans bulletins de paye.

  1. Repos hebdomadaire

Le repos hebdomadaire est obligatoire d’après l’article 156 du Code du travail. Il est payé normalement. Cependant, cette disposition n’est pas respectée pour les travailleurs employés par les tâcherons.

  1. Congé annuel

Le travailleur ont droit au congé après douze (12) mois de travail effectifs (cf. articles 158 et suivants du Code du travail, 44 de la Convention collective interprofessionnelle et 70 de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012).

Il reste que les travailleurs employés par les tâcherons n’en bénéficient pas.

  1. L’indemnité de transport

Elle est garantie par l’article 50 de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012.

Le montant minimum est de 8.750 F. Les travailleurs employés par les tâcherons n’en bénéficient pas.

  1. Liberté syndicale

Les articles 6 et suivants du Code du travail, 5 de la Convention collective interprofessionnelle et 35 et suivants de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012 consacrent cette liberté.

Cependant, tout travailleur identifié comme syndiqué est menacé de sanction.

  1. La maladie des travailleurs

Conformément aux dispositions des articles 13 et 14 de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012, le travailleur malade dont la maladie a été dûment constatée bénéficie de prise en charge dans certaines conditions.

Cependant, lorsqu’un travailleur est malade, il est laissé à son sort pour les jours passés à la maison. Les accidentés et invalides au travail sont aussi abandonnés à leur triste sort.

  1. Les femmes en état de grossesse

Les femmes en état de grossesse bénéficient d’une protection prévue par les dispositions de l’article 148 du Code du travail. Elles ont droit en effet à un congé de maternité payé.
Cependant, pour les employées des tâcherons en convention avec WACEM, le congé de maternité n’est pas pris en charge par l’employeur. Le début de la grossesse se termine souvent par le licenciement.

  1. Repas et cantine

L’article 39 de la Convention collective interprofessionnelle dispose : « Les entreprises prendront les dispositions nécessaires pour faciliter la prise des repas sur place de leur personnel ».

Cette disposition est réaffirmée par l’article 73 de la Convention collective sectorielle de la zone franche d’octobre 2012.

Il reste que pour les travailleurs employés par les tâcherons de WACEM, aucune disposition n’est prise dans ce sens.

  1. Matériel de travail

Les pièces de rechange des machines sont défectueuses ; c’est difficilement que l’entrepreneur les change avec de nouvelles.

Ceci entraîne souvent des pannes fréquentes ce qui rend difficile le travail au personnel.

IV. GREVE DES TRAVAILLEURS/EUSES ET LEUR LICENCIEMENT

Eu égard à ces mauvaises conditions de travail et de vie dans l’entreprise, les travailleurs/euses ont décidé en décembre 2012 de se concerter.

Ils ont ensuite rencontré les tâcherons qui les emploient directement en vue de l’instauration d’un cadre de dialogue et d’échanges avec eux pour la bonne marche de l’entreprise et la prévention des conflits sociaux.

Face au refus de dialoguer des tâcherons, les travailleurs/euses ont observé des cessations surprises de travail dues au retard de paiement des salaires.

Les travailleurs/euses ont ensuite observé des grèves licites portant sur les revendications ci-après : la déclaration à la CNSS, l’augmentation des salaires, l’amélioration des conditions de travail (pièces de rechange et consorts), mesures de sécurité au travail etc.

En juin 2013, un tâcheron nommé Koffi JOHNSON, directeur de l’établissement NEPAV, tâcheron de la section « Loom » annonce à ses employés que la déclaration à la CNSS est un droit fondamental des employés. Il ajoute qu’il a tout fait pour que l’entrepreneur WACEM révise le contrat des tâcherons pour qu’ils puissent immatriculer leurs établissements à la CNSS et déclarer leurs employés. Cela n’a été que peine perdue. Il poursuit qu’il se trouve donc dans l’obligation de rompre le contrat avec WACEM et ses employés à la fin juin 2013.

Après deux (02) jours de travail les 1er et 2 juillet 2013 suivis du payement, la nouvelle de rupture de contrat entre le tâcheron Koffi JOHNSON a été confirmée par son superviseur aux travailleurs/euses.

Le 3 juillet 2013 dans l’après-midi, le directeur de l’usine est venu présenter un nouveau tâcheron aux employés de la section ; comme quoi il est venu pour la continuation.

Les employés ont voulu comprendre du nouveau tâcheron comment il voulait satisfaire leurs revendications ; face au refus d’explication de celui-ci, ceux-ci arrêtent les machines. Le directeur de l’usine interviendra pour les menacer de la venue de la police.

En l’absence d’accord entre les travailleurs/euses et le directeur de l’usine, les travailleurs/euses sont partis pour revenir le 4 juillet 2013. Le tâcheron les a réunis et leur a demandé de lui présenter des lettres de demande d’emploi avant de continuer le travail.

Tous les employés de l’entreprise ont refusé et toute l’entreprise s’arrêta de nouveau.

Certains travailleurs/euses dépassés par les événements sont retournés à l’usine mais la majorité des 160 travailleurs/euses concernés est à la maison depuis lors.

Mémorandum des agents de la SNPT

DELEGATION ET REPRESENTATION DU PERSONNEL
SOCIETE NOUVELLE DES PHOSPHATES DUTOGO SNPT
BP 379 Lomé Tél : 23.31.80.40 Fax : 23.31.80.13 Cel : 90.10.26.78 / 90.05.04.18
Kpémé, le 24 Septembre 2014
A
Monsieur le Directeur Général de la Société
Nouvelle des Phosphates du Togo (SNPT)

Objet : Mémorandum

Monsieur le Directeur Général,

Nous avons l’honneur de venir respectueusement soumettre à votre attention un mémorandum sur la vie de notre entreprise commune.

En effet, le présent mémorandum qui s’inscrit dans une démarche responsable et citoyenne, a pour objectif d’attirer votre aimable attention sur la situation que traverse actuellement la Société Nouvelle des Phosphates du Togo (SNPT). Loin de nous toute idée de vouloir s’ingérer dans la gestion de la SNPT dont vous avez la charge, nous nous permettons juste de contribuer à notre manière à la pérennité de notre entreprise dont l’importance dans l’économie du Togo n’est plus à démontrer. Afin de vous permettre de mieux cerner le contexte, nous aimerions vous renvoyer aux termes de notre précédent mémo qui vous a été transmis le 13 mai 2013 et que le présent devra expliciter.

Sous l’impulsion des plus hautes autorités de notre pays, un plan stratégique de relance de la filière des phosphates est mise en place. En 2006, le gouvernement a engagé une procédure d’emprunt de trente milliards de francs (30 000 000 000 F CFA) pour relever la filière des phosphates. A ce jour la SNPT a bénéficié d’un financement de plus de soixante milliards francs (60 000 000 000 F CFA) sur fonds propres. Malgré ce lourd investissement, la SNPT, peine encore à atteindre ses objectifs de production. Cinq (05) ans après, un bilan s’impose et en sa qualité de partenaire social, la Représentation du Personnel se doit, dans une approche objective et constructive de livrer son appréciation de cette situation.

Permettez-nous de vous rappeler que le management peut se définir comme étant l’art d’organiser les ressources financières, matérielles et humaines pour permettre à l’entreprise de réaliser des performances satisfaisantes. Il va donc au-delà de la simple gestion quotidienne.

Sans méconnaître les difficultés liées à l’environnement économique mondial, nous devons nous interroger sur l’efficacité de l’organisation mise en place à la Société Nouvelle des Phosphates du Togo (SNPT) pour assurer sa relance. Nous devons nous demander si les moyens financiers déployés sont utilisés à bon escient ou si les choix stratégiques de gestion opérés sont efficients.

Nous avions fait remarquer dans notre précédant mémo de l’acquisition du matériel de mauvaise qualité : deux Roue-pelles neuves, la 1414 qui a couté trois milliards dix huit millions huit cent trente mille six cent cinquante six francs (3 018 830 656 frs) et la 1416 à quatre milliards cinq cent soixante millions quatre vingt seize mille sept cent soixante huit francs (4 560 096 768 frs) pour la mine. Dès leur mise en service, elles ont été immobilisées pendant plus d’un mois à cause des pannes. Jusqu’à ce jour, ces pannes ne sont pas enraillées. Ce type de matériel a une durée d’amortissement de plus de vingt ans. Nous ne pouvons pas passer sous silence le convoyeur transporteur de minerais HE34 dont l’installation nous a couté quatre milliards neuf cent cinquante six millions vingt mille francs (4 956 020 000 Frs) et qui, non plus n’a pas respecté le cahier de charge.

A l’usine, les toiles des nouveaux filtres à bande ont une fréquence de remplacement de trois à six mois au lieu de trois ans avec une structure métallique ne respectant pas également le cahier de charge. Nous complétons la liste du matériel de mauvaise qualité par les fours chaine 1, 2 et 5. La mise en œuvre de ce plan fait perdre à l’entreprise plus de 20% du minerai qui passe dans les rejets. Notons également le délabrement très avancé de l’usine de kpéme avec des passerelles dangereuses, toiture des magasins de stockage du minerai marchand et capots des convoyeurs de chargement pourris (présence de l’humidité dans le minerai marchand). Dans le but de réduire le temps d’arrêt et optimiser le temps de marche en rapprochant le personnel des installations, des bases vies à l’initiative de la Représentation du Personnel ont été crées à plus de deux milliards quatre cent vingt et un millions cent trente mille cinq cent francs (2 421 130 500 F CFA ). Nous sommes au regret de constater que malgré ce lourd investissement l’objectif n’est pas atteint.

Pour les représentants des travailleurs que nous sommes, nous mettons l’accent sur le dysfonctionnement dans l’organisation des ressources humaines mise en place pour relever le défi de la productivité.

Il n’est pas superflu de rappeler que la mobilisation optimale des ressources humaines, le développement des compétences individuelles et collectives influencent directement la qualité, la rentabilité et la productivité de l’entreprise et lui donnent ainsi un avantage compétitif déterminant. Concrètement, le succès des entreprises dépend en bonne partie d’un personnel en bonne santé, motivé mais aussi et surtout bien formé. Vous conviendrez donc avec nous que de la qualité de vos décisions dépendra le succès de la SNPT. Il est regrettable de constater que le personnel n’a pas subi de visite médicale depuis plus de 17 ans alors que suivant la législation Togolaise, elle est annuelle et obligatoire.

Malgré ce postulat de bon sens, nous assistons dans la gestion quotidienne de la SNPT à des faits qui nous amènent à nous interroger sérieusement sur la pertinence de la vision des organes dirigeants de la société. Cette mauvaise gestion des ressources humaines s’explique par des menaces et injures proliférées à l’endroit du personnel, les sanctions non justifiées, des sanctions hors procédures, bref un climat de psychose total qui émoussent en ce personnel l’ardeur au travail. Il faut reconnaître que là n’est pas la solution. Les menaces et les sanctions elles-mêmes sont efficaces pour empêcher le travailleur de commettre une faute mais ne l’incitent pas au travail bien fait. Si l’objectif de la SNPT reste la productivité, il va falloir revoir cette méthode. Ces insuffisances se situent à tous les niveaux et vous devez en principe vous en rendre compte. Si nous en sommes là aujourd’hui, cela est surement dû à une mauvaise orientation du plan de relance conçu et piloté par le consultant de la SNPT. On ne peut pas se vanter de la répartition actuelle des responsabilités telle qu’elle transparait dans l’organigramme de mars 2014

En principe, dans un organigramme, chaque acteur doit être déployé dans la position la plus appropriée de sorte que ses potentialités propres soient pleinement utilisées. A la SNPT, les organigrammes n’ont toujours pris en compte que l’encadrement supérieur. Les catégories subalternes sont tout simplement gérées dans une confusion générale et sans aucune chaine de commandement. Ce personnel non-cadre travaille sans description de poste et souvent avec un matériel inadapté. L’organigramme en vigueur est incomplet, certains services clés ont purement et simplement été transformés en cellule. C’est l’expert financier expatrié qui dirige en lieu et place du Directeur Général.

En fait, cet organigramme n’est qu’un simple instrument conçu dans le but de régler des comptes à certains travailleurs et de récompenser des « frères de village » avec à la clé des affectations et des promotions fantaisistes, des nominations avec probité morale douteuse. Il est donc fréquent de voir des cadres compétents et expérimentés, purement et simplement mis à l’écart sur la base des critères qui ne sont pas professionnels. Le résultat c’est qu’on assiste au développement d’une coterie qu’il faut dénoncer ici parce que cette situation n’est pas de nature à assurer la paix sociale au sein de notre entreprise exploitant des Ressources Nationales. Nous pensons que le seul critère de promotion est et doit rester la compétence.

La conséquence en est qu’il y a une confusion dans l’ordre des finesses et des moyens dans l’exécution du budget. Les ressources dégagées sont mal affectées. Les réajustements et coupes budgétaires illustrent nos propos. Ainsi, menaces, peur, hésitation, règlement des problèmes au cas par cas, décisions prématurées ou impulsives sont devenus la marque de fabrique des responsables de la SNPT.

En cela, il est exigé de vous de connaitre les stimulants qui inciteront le personnel à mieux travailler et à fournir des résultats supérieurs. Il n’est pas nécessaire de rappeler que la démotivation des employés entraine une série de coûts cachés en termes d’écart de productivité. Au même moment, vous vous attachez aux services d’expatriés grassement rémunérés aux dépens des Nationaux disposant des mêmes qualifications professionnelles.
Un expatrié vaut plus de 20 ingénieurs nationaux en termes de salaire de base soit six millions de francs CFA contre deux cent trente mille francs. Ils coutent à l’entreprise plus de trente sept millions de francs par mois sans compter les autres avantages.

Dans sa politique de réduction de la pauvreté au Togo, le Chef de l’Etat a promulgué une nouvelle convention collective interprofessionnelle depuis 2011. Nous tenons à rappeler à votre aimable attention que malgré les multiples revendications des travailleurs sur l’application de cette convention, le personnel de la SNPT traine encore une grille salariale inférieure aux minima conventionnels vu les conditions de travail difficiles, l’augmentation du prix de la tonne du phosphate qui est passé de 35$ à 90$ avec un pic de 300$ et les risque très élevés : 1099 cas d’accidents dont 05 accidents mortels, 02 avec amputation de membres depuis l’année 2009. A cela s’ajoute la diminution du pouvoir d’achat des travailleurs par la suppression unilatérale des primes.

Depuis plus de quinze (15) ans, la filière des Phosphates n’a plus jamais formé ses employés. Il faut préciser que le Maroc formait les agents de maîtrise qui constituent l’épine dorsale de l’entreprise, qui plus tard, au regard de leurs performances peuvent, suite à des renforcements de capacité intégrer la catégorie des cadres. Les agents d’exécution complétaient leur formation pour être reclassés dans la catégorie des agents de maîtrise. Il y avait une planification des départs à la retraite de manière à ce que les transferts de compétence puissent s’opérer aisément. En cette matière nous pouvons dire avec fierté que dans les années 1989-1990 l’entreprise a atteint sa vitesse de croisière avec plus de trois (03) millions de tonnes sous la responsabilité des cadres nationaux. Nous disposons au plan local des compétences qu’il suffit simplement de mettre au travail. Nous ne tirons rien de ces experts qui crèvent nos ressources et ruinent à petit feu l’entreprise sans nous apporter de résultats probants.

En ce qui concerne la santé et la sécurité des travailleurs, nos différentes correspondances et relances sont restées sans suite à ce jour. Ce qui témoigne si besoin en était, du peu d’importance que vous accordez à cette question. Le personnel a de la peine à réaliser que depuis plus de trois (03) ans, il réclame encore le matériel de protection individuelle et la visite médicale dans un environnement de travail où les risques professionnels sont élevés du fait de la nature de l’activité mais aussi de la mauvaise qualité du matériel acquis à grand prix. En cela, vous avez été aidé par les représentants du personnel qui, dans les formes usuelles, ont toujours porté à votre connaissance les revendications des travailleurs. Vous comprenez que ces besoins sont aussi ceux de tout être humain. Les travailleurs veulent pouvoir vivre du fruit de leur labeur. Ils aspirent à la sécurité de leur emploi.‟ Nous voulons travailler dans un environnement sain et sécurisé. Bref nous voulons appartenir à la grande famille des agents de la SNPT”

Les conséquences de ces dysfonctionnements peuvent être parfois graves et souvent imprévisibles. On ne peut donc pas être surpris des résultats d’un tel modèle de management. Comprenez que le personnel n’arrive pas à réaliser qu’après avoir accompagné la SNPT et lui permettre de s’autofinancer à plus soixante cinq milliards de francs (65 000 000 000Fcfa) selon vos propos, en portant la production de six cent mille tonnes (600 000T) à un million trois cents mille tonnes (1 300 000T), ce même personnel et comme par hasard, est devenu subitement voleur, paresseux et saboteur.

Monsieur le Directeur Général, il faut que la SNPT cesse d’être le cancre de classe et intègre le rang des entreprises performantes en misant désormais sur le capital humain !
Aujourd’hui, nous pouvons affirmer sans risque de nous tromper que le plan de relance de la filière des phosphates mis en place par les autorités du pays a travers le consultant est un échec , ceci du fait de son mauvais choix et de son pilotage.

Pour gagner ce pari et retrouver ses lettres de noblesse, pour la SNPT il suffit de :

Mettre en place une politique de motivation qui passe par l’identification des besoins du personnel

Faire confiance aux cadres nationaux avec une feuille de route clair et des évaluations à mi-parcours.

Faire représenter le personnel au sein du Conseil d’Administration à l’instar des autres Sociétés d’Etat.

Redéfinir un plan stratégique qui prenne en compte aussi bien l’organisation des Ressources Humaines que l’orientation des investissements

Définir un programme de formation après identification des besoins

C’est pourquoi nous avons saisi cette occasion pour attirer une fois encore votre attention et vous rappeler vos responsabilités en nous disant qu’en tant que Représentants du Personnel, nous aurions failli à notre mission si nous ne vous alertons pas à ce niveau, sur ce qui précède, à toutes fins utiles.

La modération et la courtoisie des termes de nos propos n’enlèvent en rien la gravité de la situation que traverse aujourd’hui la SNPT et qui n’honore personne. Cela doit appeler de notre part un sursaut patriotique et des actions rigoureuses pour sauver ce qui peut encore l’être. Les salariés que nous représentons ne sont pas prêts à subir encore les conséquences d’une mauvaise gestion imputable à la hiérarchie.

En conséquence, nous vous saurions gré des dispositions que vous voudriez bien prendre pour redresser la barre.

Vous pouvez d’ores et déjà compter comme d’habitude sur la disponibilité de vos partenaires sociaux que nous sommes.

La Représentation du Personnel se réserve le droit de faire tenir copie de ce mémo pour information et action à toute autorité que son contenu pourra intéresser.

Nous tenant à votre disposition pour des informations complémentaires, veuillez agréer, Monsieur le Directeur Général, l’expression de notre meilleure considération.

Ont signé :

Le Président B/L Kpémé, Le Président B/L Hahotoé
Kodjo TIASSOU, Poro EGBOHOU
SG SYLIMITO, SG SYNAPOSTE, SG SYNEM
Yempabe DOUTI, Tiame ALADJI, Assih BAKA
SG SYNAMITO, SG SYDEMINES,
Issaou SATCHIBOU, Afangniakossou AMOUZOU
Ampliations :
Conseil d’Administration
Ministre des Mines et de l’Energie
Conseil de Surveillance