Des files indiennes dans les stations d’essence, la montée en flèche du prix de l’essence frelatée passée de 500 à 1000 FCFA. C’est la scène qui a été observée à Lomé et dans plusieurs villes du pays les 1er et 02 janvier passés. Elle rappelle fin d’année 2016 et début 2017. La situation ne semble pas s’améliorer au fil des ans afin d’éviter aux conducteurs des engins à quatre et à deux roues des désagréments dus à la pénurie de carburant. Mais le gouvernement tente de se justifier. Comme toujours. Mais l’horizon n’est pourtant pas dégagé.

Des files d’attente dans une station de service à Lomé, janvier 2018 | Photo : KL/VOA Afrique

« On a remarqué une forte demande depuis un certain temps, ce qui fait que ce qui était livré peut-être pour une semaine part à 24 ou 48 heures. Les marketeurs ne s’attendant pas à cette pression, cela fait que le temps d’être réapprovisionné, il y a des files qui se font. Au niveau national, on n’a aucun souci, la STE (NDRL, Société togolaise d’entreposage) charge normalement (…) on a même sollicité la STSL (NDLR, Société togolaise de stockage de Lomé) à charger les camions. Pour la consommation nationale, c’est la STE seule qui s’en charge et la STSL s’occupe de l’extérieur. Mais vu la demande on a sollicité aussi la STSL pour aider à charger pour la consommation nationale », a tenté d’expliquer Bernadette Legzim-Balouki, ministre du Commerce et du Secteur privé. Et de se dédouaner : « Quand la station n’a plus de carburant, elle doit s’adresser à la direction dont elle dépend. Si c’est Total, elle doit s’adresser à sa direction générale et si c’est CAP, ainsi de suite. Le temps qu’elles fassent la demande à leur direction générale et que cette dernière fasse le point de tous ceux qui ont fait la demande pour venir faire la commande au niveau du ministère, ça met du temps. A notre niveau, dès que la demande arrive, on prend des dispositions pour leur donner le produit. Et quand ils ont le produit, ils vont présenter le bon à la STE où ils sont chargés. C’est ça qui fait qu’on a l’impression que ça dure ». Visiblement pour la ministre, c’est le temps des commandes qui serait retardé et à l’origine de la pénurie.

Et pourtant, ce n’est pas la première fois que cette situation se produit. En début d’année 2017, les Togolais ont été confrontés à la pénurie de carburant. Cette année encore, rebelote. Mais le gouvernement tente de faire croire que cela n’a jamais été le cas. « On prend toujours des dispositions, surtout à la fin de l’année pour charger (…) C’est une expérience, il faut redoubler encore d’efforts », a essayé de convaincre la ministre. Mais elle est loin de convaincre. La ministre affirme que le gouvernement prend toujours des dispositions à chaque fin d’année pour éviter de tels désagréments. Ce qui n’est pas vrai si on s’en tient à 2017 et ce qui s’est produit les 1ers et 02 janvier de cette nouvelle année. Ce que Bernadette Legzim-Balouki ne semble pas dire, c’est que le gouvernement n’anticipe pas sur la pénurie. Il se contente des stocks existants et se laisse surprendre par les événements.

A en croire la ministre du Commerce, la rupture de stock proviendrait des stations d’essence qui traînent à passer la commande. Le doigt accusateur est ainsi pointé vers les fournisseurs de carburant aux conducteurs des engins à quatre ou à deux roues. De plus, ce que le membre du gouvernement ne dit pas ou élude, c’est que les mécanismes de fourniture de carburant au Togo sont très complexes. Des rôles des traders aux commissions en passant par la structure des prix avec en toile le prix du baril à l’international, tout fait souvent que le gouvernement tergiverse et se laisse prendre au dépourvu par la demande. L’offre devenant insuffisante, il s’emploie à trouver des justificatifs parfois à dormir debout pour couvrir ses négligences.

En effet, à Anié, les stations d’essence ont délibérément refusé de servir les particuliers et les voitures de transport en commun. Elles ont préféré les véhicules de l’Administration ainsi que leur personnel. Cette privation orchestrée contredit Bernadette Balouki-Legzim et a sérieusement mis à mal les activités dans cette ville très stratégique puisque la plupart des voitures qui rallient le septentrion s’y ravitaillent en carburant.

Pour l’instant, le gouvernement est arrivé à « sauver » la situation. Mais rien n’assure que la solution sera pérenne. Aussi, les assurances de Bernadette Legzim-Balouki seront-elles jaugées début d’année 2019 puisque la pénurie de carburant devient cyclique comme les grèves à répétition dans les enseignements primaires et secondaires au Togo. En rappel, en 2015, Faure Gnassingbé avait placé son mandat sous le sceau du social. Mais paradoxalement, peu après cette annonce, les prix des carburants ont augmenté. Des faits qui illustrent que les Togolais ne sont pas encore sortis de l’auberge face à la pénurie du carburant malgré les indiscrétions sur la production aux larges des côtes togolaises.

Source : L’Alternative