Dans l’une de nos parutions, nous vous informions que suite à une descente musclée, la DCPJ a mis le grappin sur une bande de chinois qui faisait du proxénétisme, un business florissant. Un élément du gang sera libéré après que le chef de fil ait mouillé les tiroirs de certains acteurs du dossier. Mais présentement, au moins deux personnes sont encore détenues.

Illustration : RT / 27avril.com
Illustration : RT / 27avril.com

Dans le but de lutter contre le trafic d’êtres humains, une délégation du Ministère chinois de la sécurité publique a séjourné à Lomé. Elle a échangé avec les autorités compétentes et recueilli des preuves dans le cadre de l’affaire de proxénétisme reproché au nommé DAI Hong, LI Mingxing et LI Wei. En attendant de découvrir, l’avocat-conseil des victimes, encore faut-il qu’il accepte parler, nos investigations ont accouché de nouveaux éléments. C’est une évidence que les avocats perdent souvent leur latin pour des dossiers en instance. De nos recoupements de sources bien renseignées, nous vous livrons donc la suite du dossier précédemment publié au sujet de ce réseau chinois.

En effet, le réseau prospérait à Kodjoviakopé, un des quartiers populaires de la capitale togolaise. Une des victimes de l’exploitation sexuelle parvient à faire cas à ses parents de sa situation par téléphone. Ses parents lui donnent le numéro de son frère en séjour en Afrique. Heureuse coïncidence, elle téléphone au frère qui se trouve au Togo. Elle lui explique sa situation et celui-ci se présente au réseau comme un client ordinaire en quête du sexe chinois. Les gérants lui présentent les marchandises, les filles, et il choisit sa sœur puis paie les frais afférant avec la promesse de la ramener le lendemain. Naturellement, il sauve sa sœur et va porter plainte à la police. Ceci a permis à la DCPJ de découvrir le réseau. Une descente policière permet d’arrêter 3 personnes et de libérer les filles des griffes de leurs bourreaux. Le caractère proxénète du réseau doit être établi après un procès, afin de confirmer ce que la police a vécu sur le terrain. Les échanges téléphoniques entre le chef de gang, sa femme et les filles exploitées en disent long. Mais l’on cherche des subterfuges pour disculper M. DAI Hong, le bon samaritain qui a mouillé certains sur la ligne de la DCPJ au tribunal.

M. DAI Hong, c’est le présumé chef de gang, il est inculpé et détenu. Sa détention semble donner de l’insomnie à certains réseaux qui s’activent pour sa libération. Le chinois est donc en voie d’être libéré sous le fallacieux prétexte qu’il est souffrant alors qu’on est au stade de la confrontation qui est sensé se poursuivre. Faux, le monsieur se porte aussi bien que le soleil de midi. Ne soyez donc pas surpris qu’un de ces jours une unième demande de mise en liberté finisse par sauter le verrou sur ce monsieur. Après plusieurs demandes infructueuses, cette fois, la machine semble vraiment être lancée pour que le gars soit libre de ses mouvements. L’argent a assez circulé de la police à la justice, mais aussi, certaines ayant reçu leur part du gâteau ne se font pas prier pour rentrer en scène. Cette activité est un cocktail de tous les trafics, une mine d’or qui a les moyens de sa politique. De sources bien informées, le réseau aurait fait circuler plus de 100 millions FCFA dans les couloirs de la corruption pour se tirer d’affaire. Un magistrat en activité a encaissé des millions FCFA, un autre, ancien procureur général de s’en tirer avec 30 millions FCFA pour intervenir au chevet du réseau transfrontalier en souffrance depuis qu’il est démantelé. Nous vous disions dans le dossier précédant qu’un agent de police qui a servi de cordon pour distribuer de l’argent de la DCPJ à la justice est detenu. Le juge Djagba doit faire preuve d’intégrité sans quoi on risque de supposer que les sbires du réseau chinois qui ne se font plus discrets dans les couloirs de la justice sont passés par sa porte.

Nous espérons qu’il nous aidera à démentir les informations à son sujet par rapport à ce dossier sensible où les enveloppes ont circulé dans beaucoup de couloirs. Deux des plaignantes sont revenues au Togo dans le cadre d’une confrontation qui s’est tenue le 23 août dernier. De sources proches de la communauté chinoise, alors que tout a bien commencé avec l’audition des deux victimes, le juge Djagba est devenu méconnaissable à l’entrée des inculpés DAI Hong et LI Mingxing. Les plaignantes à la sortie de la confrontation n’ont pas hésité à joindre leur pays pour faire part du « revirement du magistrat devenu avocat défenseur des inculpés ». Comme par enchantement, la confrontation se serait déroulée en l’absence du Procureur de la République, qui, tout comme de l’audience, n’aurait pas connaissance de l’arrivée des deux plaignantes. Le cas de ce réseau a de quoi inquiéter, quand on sait qu’en Chine, plus d’une quarantaine de filles se plaignent de ses abus.

Si le policier détenu, un des intermédiaires par qui la comptabilité du chinois fait circuler l’argent, a refusé de donner les noms des récipiendaires, le présumé chef de gang chinois a lâché les noms de ceux à qui il a fait remettre les sous par ses sbires aussi bien dans les couloirs de la DCPJ qu’au tribunal. Il nous revient que dans certains milieux on s’empresse à le libérer et sa femme codétenue se porte en agneaux sacrificielle des crimes de son copain. Ceci, afin que celui-ci, une fois libérer, lui retourne l’ascenseur. Elle se nomme LI Mingxing, c’est la gérante des filles qui seraient exploitées. L’on s’évertue à faire croire que c’est elle qui est au centre du crime et que son compagnon, pourtant présumé véritable cerveau selon la traduction des aveux des victimes, est un blanc saint.

LI WEI, lui est déjà mis en liberté. Il est l’homme de main du réseau. Il est chargé de livrer la marchandise, c’est-à-dire, les filles, et de récupérer l’argent. D’après les informations, ce monsieur a déjà quitté le pays et n’a pas comparu à la dernière confrontation. D’ailleurs, comme pour planter le décors à la suite que l’on veut donner à cette triste épisode, contre les bonnes pratiques de la procédure, cet homme de main avait déjà eu gain de cause de sa demande de mise en liberté avant que les plaignantes ne soient informées. Et ceci, nonobstant la disposition qui veut que, « Lorsqu’il y a une partie en cause, l’ordonnance du juge d’instruction ne peut intervenir que quarante-huit heures après notification faite à cette partie », article 115, alinéa 4 du code de procédure pénale.

Mlle CHENG YUAN YUAN, son mari l’a abandonné en emportant l’enfant à cause de ce réseau. Elle fait partie des 5 plaignantes constituées dont deux ont pu revenir au Togo pour suivre le dossier. Mlle CEN FEI FEI, elle a témoigné avoir reçu 12 comprimés contraceptifs afin que ses menstrues s’arrêtent pour ne pas risquer des grossesses. On l’a une fois fait faire l’amour avec trois hommes simultanément. Quand elle en avait assez, elle a voulu se donner la mort en sectionnant ses veines. Les cicatrices sont encore visibles. Outre le travail du sexe, cette bande est aussi un réseau d’autres trafics. A la DCPJ, les déclarations des filles concernant certains volets n’ont pas été consigné. Les plaignantes ayant estimé leur déposition infidèle, une seconde audition a dû être faite à titre complémentaire par l’officier BAKOMA de la DCPJ. Encore faut-il qu’elle arrive au juge et qu’elle soit prise en compte. Les faits sont si graves que si ce dossier passe inaperçu, ce n’est pas seulement le droit des plaignantes qui prend un coup, mais la crédibilité de nos magistrats, l’image de la justice togolaise malgré les discours parfumés de bonnes intentions.

Dans les coulisses, il serait demandé aux filles ce qu’elles veulent. Elles répondent qu’elles veulent que justice soit rendue, aucune sommes ne peut réparer les préjudices subits. Les présumés proxénètes seraient déjà signalés à leur ambassade pour d’autres crimes; mais l’ambassade aurait répondu qu’elle ne peut rien. Est-ce une activité légale en Chine ? L’autre grande surprise est donc le silence de la représentation diplomatique de Chine au Togo face à ce dossier. Bon à suivre.

Source : Abi-Alfa, Le Rendez-vous N° 286 du du 30 août 2016