Deux bébés siamois guinéens de 4 mois et demi, nés en Guinée, ont été séparés la semaine dernière à l’hôpital Necker à Paris après une opération de quatre heures, comme le révèle lundi Le Figaro.

Fatouma et ses des deux bébés siamois guinéens, Hassane et Boubacar, avant qu'ils aient été séparés avec succès à l'hôpital Necker à Paris, France | Photo : Europe 1
Fatouma et ses des deux bébés siamois guinéens, Hassane et Boubacar, avant qu’ils aient été séparés avec succès à l’hôpital Necker à Paris, France | Photo : Europe 1

Une partie de système digestif en commun.

Hassane et Boubacar sont nés début janvier à l’hôpital Donka, CHU de Conakry. Reliés par la taille, au niveau de l’abdomen, les deux bébés siamois guinéens avaient 20 centimètres de peau et une partie du système digestif en commun, notamment le foie et un morceau d’intestin grêle. Première prouesse : ce sont les premiers bébés siamois nés vivants en Guinée. Une naissance si exceptionnelle que la nouvelle se répand très rapidement dans tout le pays.

Quand Fatoumata, la mère des deux enfants siamois est arrivée à l’hôpital pour accoucher, tous pensaient qu’il ne s’agissait que de jumeaux. Fatoumata raconte : « Tout se passait très bien, quand soudain la sage-femme s’est mise à crier :  » Au secours, aidez-moi, ce sont des siamois! » Après je ne sais plus ce qui est arrivé ». Finalement, la sage femme a réussi à procéder à l’accouchement en les faisant sortir par les voies naturelles. Grâce à cette brave sage femme, l’équipe guinéenne est parvenue à éviter de transfuser les enfants, réduisant les risques et facilitant la prise en charge des bébés, d’après le Figaro.

Une opération très risquée. 

Après de nombreux examens, les médecins de Conakry confirment qu’il est possible de les séparer. Toutefois, aucun hôpital situé à proximité et dans les pays voisins n’était à même de réaliser l’opération nécessaire pour les séparer.

C’est finalement grâce à un don « La chaîne de l’espoir », une association fondée en 1994 par le professeur Alain Deloche visant à venir en aide aux enfants démunis à travers le monde, que l’opération a été financée. Les deux bébés siamois guinéens sont envoyés en France pour une opération chirurgicale des plus délicates.

Pour préparer au mieux cette opération, une équipe multidisciplinaire de 7 chirurgiens répartis en 2 groupes, et des infirmiers et des anesthésistes a été composée. L’équipe a répété l’opération à plusieurs reprises avant le jour J. Les chirurgiens ont imaginé toutes les complications possibles pour être prêts. Chaque outil, chaque masque à oxygène a été attribué à un enfant – des gommettes bleues ont été attribuées à Boubacar, des roses pour Hassan.

Une anesthésie acrobatique.

L’opération est lancée le 26 mai. Après un dernier moment passé avec ceux qu’elle appelle affectueusement ses « deux moustiques », Fatoumata, la mère des bébés siamois guinéens, les dépose sur le brancard. L’anesthésie, extrêmement délicate, commence. « L’intubation ne va pas être facile car il va falloir mettre un enfant sur le dos en tenant l’autre au-dessus de lui, puis inversement », raconte au Figaro l’une des anesthésistes quelques minutes avant le début de l’opération. Ensuite, les deux équipes de chirurgiens commencent leur périlleuse incision. Au millimètre près, ils séparent le foie en deux et une partie des intestins.

L’opération commencé à 8h aura duré toute la journée. Hassan est sorti du bloc à 17h30, et son frère Boubacar l’a rejoint une heure plus tard.

Cette opération réussie n’a été rendue publique seulement qu’une semaine plus tard, pour s’assurer que les deux bébés siamois guinéens séparés allaient bien. Tous leurs organes fonctionnent parfaitement et, comme deux jumeaux, ils se cherchent désormais quand on les réunit dans un berceau.

Hassane et Boubacar des-bébés siamois guinéens ont été séparés avec succès à l'hôpital Necker à Paris, France | Capture d'écran
Hassane et Boubacar des-bébés siamois guinéens ont été séparés avec succès à l’hôpital Necker à Paris, France | Capture d’écran

Le professeur Yves Aigrain qui a dirigé cette opération, a expliqué sur le site de l’hebdomadaire l’Obs : « Depuis que j’ai rejoint le service de Necker, il y a sept ans, nous avons séparé trois paires de jumeaux conjoints (…) Il y a environ huit autres paires de jumeaux qui avaient été opérés durant les 10 ans précédents. Nous n’avons pas eu de mortalité ».

De bonnes perspectives d’avenir désormais, les pronostics sont bons pour les deux jumeaux guinéens qui rentreront dans quelques semaines à « Kilomètre 36 », une bourgade de la banlieue de Conakry, la capitale guinéenne, pour retrouver leurs frères et sœur et commencer leur nouvelle vie. « Je suis très contente, et soulagée que tout ce soit bien passé », s’est ainsi réjoui leur mère, Fatoumata.

Dans quel cas peut-on séparer des siamois?

Comment se forment les siamois ?

D’après les chiffres de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris en 2009, les cas de bébés siamois sont extrêmement rares : 1 grossesse sur 50.000 à 100.000. La plupart du temps, il s’agit de filles. Mais comment se forment justement ces bébés siamois ? C’est une question de timing dans le développement de l’embryon. Quand l’œuf se divise accidentellement au début de la grossesse, soit les jumeaux auront un placenta chacun, soit ils partageront le même placenta, soit ils partageront des organes en commun.

Existe-t-il de nombreux cas de bébés siamois ?

En Europe, les cas de bébés siamois restent très rares. « Il y a des échographies anténatales et les malformations importantes donnent très souvent lieu à des interruptions de grossesse », explique à Europe 1 Christophe Chardot, l’un des sept chirurgiens pédiatriques à l’hôpital Necker qui a participé à l’opération sur les bébés siamois guinéens. « Certains bébés siamois survivent dans des pays où les examens durant la grossesse sont assez limités », des pays très souvent sous-développés. Le cas des bébés Guinéens renforce cette hypothèse. Fatoumata, la mère d’Hassane et Boubacar était persuadée qu’elle accoucherait de jumeaux.

Dans quel cas peut-on séparer des siamois ?

Les bébés siamois sont donc très rares à naître. Et quand la grossesse va jusqu’au terme, peut-on toujours les opérer ? »Cela dépend des organes qui sont en commun », nous explique le Professeur Chardot, chirurgien pédiatrique à l’hôpital Necker. « Si on peut diviser un organe commun pour en créer deux complètements fonctionnels, l’opération est envisageable. Chaque couple de siamois est différent et nous devons adapter la stratégie chirurgicale en fonction des organes partagés », poursuit-il. « Il y a bien évidemment des cas où il n’existe aucune solution, quand les siamois sont reliés par la tête, par exemple ».

Sources : [01/06/2015] Europe 1 + MaxiSciences + 27avril.com