« Ce sont nos choix qui font de nous ce que nous sommes » (Kem Nunn)

Octobre est institué au Togo mois de promotion de la consommation locale. Les populations sont invitées durant ce mois à acheter et à consommer les produits made in Togo. Une initiative recommandée par l’Union économique monétaire ouest africaine (UEMOA) afin de susciter l’intérêt des populations à consommer les produits du terroir, mais aussi à stimuler la croissance économique.

A l’occasion, la Première ministre Victoire Tomégah-Dogbé a, dans une note circulaire, exhorté ses collègues ministres, des hauts fonctionnaires et autres directeurs de société, etc. à s’« approvisionner, en priorité, en produits et services d’origine locale et à privilégier la consommation des mets locaux dans les menus de pause-café, de pause-déjeuner, de dîners de gala, de diners débats, d’ateliers, de groupes de travail des comités de réflexion, de commissions techniques, de sessions de conseils d’administration et de surveillance, de sessions de comité de pilotage ainsi que de toute cérémonie officielle.» La Première ministre appelle au respect de la note circulaire pour la réussite de la politique de la consommation locale.

Rien à dire sur cette exhortation qui est une initiative fort louable. Cependant, comme on peut le constater, les gouvernants ont réduit la consommation locale aux seules denrées agricoles, ce qui est d’ailleurs compréhensible, le Togo qui aspire à l’émergence à l’horizon 2030, ne produisant presque rien, ni le textile, encore moins l’électronique. Il y a quelques années pourtant, notre pays disposait de l’usine de Datcha qui était le fleuron de l’industrie textile togolaise, réputée dans la région ouest-africaine pour la qualité des pagnes produits.

Même si à l’époque, on préférait le «Wax hollandais », et autres « Hitarget » qui étaient les marques les plus prisées dans lesquelles ont fait fortune les célèbres Nana Benz. Aujourd’hui, l’usine textile de Datcha est un mauvais souvenir pour les Togolais. Elle est à l’abandon et le site est devenu une broussaille où les populations font la chasse. Promouvoir la consommation, c’est aussi penser à réhabiliter cette infrastructure qui naguère faisait la fierté du Togo et d’autres comme l’usine textile de Kara, l’huilerie d’Alokoegbé, etc.

En début d’année, Faure Gnassingbé aurait « donné des instructions » pour remettre en service l’industrie textile afin qu’elle puisse retrouver son lustre d’antan. On le sait, les promesses n’engagent que ceux qui y croient.

Même dans le domaine agricole, les Togolais consomment très peu ce qu’ils produisent. Presque la totalité de ce qui est consommé est importé. Un décret ou une circulaire ne suffit pas, il faut un changement de mentalité, de comportement pour encrer la consommation locale dans nos habitudes. A commencer par les gouvernants qui doivent être des phares, servir de modèle pour les populations.

« La première exhortation du PM ne devrait-elle pas porter sur la consommation de soins locaux, ceux qui sont dispensés dans nos hôpitaux et centres de santé ? Si les ministres devaient se soigner localement, certainement que le gouvernement nous mettrait à disposition des hôpitaux dignes de ce nom. Les Togolais attendent cela », relevait Nathaniel Olympio.

Dans le même ordre d’idées, on peut évoquer les boissons locales comme le Tchoukoutou ou le Sodabi qui sont considérés comme des breuvages des pauvres. Faure Gnassingbé et son entourage préfèrent des produits luxueux, des vins millésimés reconnus comme étant le symbole de la réussite sociale et souvent de la victoire.

En 2019, le Togo était classé troisième importateur de champagne en Afrique de l’Ouest. Notre pays avait en effet importé en volume 160.000 bouteilles de champagne pour une valeur de plus de 3,1 millions d’euros, soit 2 milliards de FCFA.

Nous voulons consommer local ? Alors intéressons-nous aussi aux boissons de chez nous.

Médard Ametepe

Liberté N°3252 du 13 octobre 2020