Le senat
Extrait de la Une de Fraternité No.313

Demain jeudi 16 mai, commencera le recensement de 3 jours décrété par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), en prélude aux élections locales prévues pour fin juin. Ces élections rêvaient d’une grande importance pour le développement local et l’encrage de la démocratie au Togo. Mais ce n’est pas tout.

A moins d’une survenance de cataclisme, les Togolais se rendront aux urnes le 30 juin 2019 pour élire les conseillers municipaux. Ces élections locales devraient contribuer à améliorer la gouvernance locale et l’accès des citoyens aux services municipaux. Mais vraisemblablement, cette joute en vue a un enjeu sous attendu.

En effet, les réformes constitutionnelles tant attendues au Togo ont finalement été votées clopin-clopant à l’Assemblée Nationale mercredi dernier au terme d’un long micmac. Limitation du mandat présidentiel, changement du mode de scrutin pour les élections présidentielles, augmentation du mandat des députés sont entre autre les modifications notables. Et ce qui intéresse dans le cas de la présente analyse est la composition des membres du futur Sénat.

En effet, la nouvelle loi fondamentale dispose en son article 52 : « Le Sénat est composé de : deux tiers (2/3) de personnalités élues par les représentants des collectivités territoriales ; d’un tiers (1/3) de personnalités désignées par le Président de la République. Et des anciens présidents de la République, membre de droit à vie. La durée du mandat des sénateurs est de six (06) ans renouvelable deux (02) fois. Une loi organique fixe le nombre des sénateurs, leurs indemnités, les conditions d’éligibilité ou de désignation, le régime des incompatibilités et les conditions dans lesquelles il est pourvu aux sièges vacants. Une loi organique détermine le statut des anciens sénateurs. Les membres de l’Assemblée nationale et du Sénat sortants, par fin de mandat ou dissolution, restent en fonction jusqu’à la prise de fonction effective de leurs successeurs ».

Ainsi, les 2/3 des sénateurs seront désignés par des élus locaux. Et sans surprise la majorité de ces conseillers municipaux seront issus des partis politiques. Par conséquent, par le jeu des accords dissimulés, une pratique courante dans la politique au Togo, les vieux politiciens (barons du pouvoir et opposants historiques) pourront s’offrir 12 ans de vie sénatoriale avec tous les avantages qui vont avec.

Aujourd’hui, la tendance est à un rajeunissement de la classe politique vieillissante. Pour ne pas laisser certaines de ces personnalités d’une manière ou d’autre encombrant pour le pouvoir sur le carreau, il fallait trouver une alternative légale non seulement pour leur permette d’avoir une retraite dorée mais aussi les protéger contre d’éventuelles poursuites judiciaires. Puisque, comme les députés, les sénateurs sont exempts de poursuites judiciaires au cours de leurs mandats. La plupart des concernés déjà en âge avancé n’auront plus grande chose à faire sur terre au terme de six ans ou de 12 ans de mandat. Quand on connait toutes les tracasseries qui entourent la levée d’immunité d’un élu de ce rang, c’est clair que ces vieux politiciens pourraient dormir tranquille.

Dans les démocraties occidentales, le contrôle du gouvernement est, à côté du vote de la loi, la deuxième grande fonction du Sénat. Ce contrôle s’exerce sur le gouvernement en séance publique et, de façon permanente, par le travail des commissions et délégations du Sénat. Les actions de contrôle prennent la forme de questions, rapports, débats, et couvrent l’ensemble des champs de l’activité publique.

Reste à savoir si au-delà des intérêts politiciens, le Sénat togolais jouera son vrai rôle.

Source : Fraternité No.313 du 15 mai 2019