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« L’Afrique de l’Ouest est devenue une plaque tournante du trafic de cocaïne. Il ne s’agit pas uniquement d’un problème de drogue. C’est une menace grave pour la sécurité » (ONUDC)

De tout temps, le Togo a été accusé de plate-forme de trafic international de drogue. Le marché florissant de la schnouf passerait par Lomé notamment son port. La situation était telle qu’en 2012, le Secrétaire d’Etat américain Hillary Clinton avait dû effectuer une visite à Lomé. Quand l’ancien ministre de la Défense, Kpatcha Gnassingbé avait été arrêté dans la nébuleuse affaire de tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat, tout le dossier puant de trafic de drogue a été opportunément orienté à sa direction. Il était accusé d’avoir offert sa protection aux narcos au moment où il officiait en tant que ministre de la Défense. Sauf que depuis 12 ans, Kpatcha Gnassingbé est au gnouf. Et le trafic de drogue a toujours le vent en poupe. Les saisies se multiplient.

L’année dernière, la police espagnole avait intercepté en Galice un navire battant pavillon togolais avec quatre tonnes de cocaïne à bord. Quelques mois plus tôt, plusieurs tonnes de cocaïne dissimulées dans des conteneurs estimées à plus d’un milliard de dollars US à destination du port de Lomé avaient été saisies par les autorités uruguayennes à Montevidéo qui avaient évoqué «le coup le plus important porté au narcotrafic dans l’histoire du pays».

Le 02 mars dernier, 17 tonnes de résine de cannabis ont été interceptées à Niamey au Niger. La cargaison d’une valeur de 20 milliards de FCFA a transité par le port de Lomé. « La drogue a quitté Beyrouth dans un container transporté par une société indienne jusqu’au port autonome de Lomé où elle a été chargée dans un camion d’immatriculation béninoise à destination de Niamey », a expliqué le responsable communication de l’Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (Ocretis).

Cette opération de démentèlement remet au goût du jour que Lomé demeure très actif dans le trafic de drogue. Elle suscite également des questionnements. Comment une cargaison d’un tel volume, 17 tonnes, a été enlevée au port de Lomé et chargée dans un camion au nez et à la barbe des agents et autorités portuaires sans qu’ils n’aient pu identifier le contenu ?

En 2016, le port de Lomé avait été doté d’un scanner mobile ultramoderne pour non seulement sécuriser les opérations ou transations, mais aussi faciliter la détection des produits ou marchandises illicites et de fraude.

« Le nouveau scanner permet des contrôles de tout conteneur conformément à la réglementation nationale et aux normes internationales en vigueur dans le transport maritime. Suivant les modes choisis, le scannage peut se faire sur un camion à l’arrêt, 5 camions simultanément ou sur des camions ou véhicules en déplacement. Il est outillé pour faciliter la détection des produits illicites et de fraudes. Doté d’une valise portable, lui conférant une efficacité mobile, ce scanner peut être déployé en dehors du périmètre dédié pour des contrôles hors de la plateforme portuaire », avait-on expliqué à l’époque.

Pourquoi malgré ces dispositifs, la drogue continue de transiter au port de Lomé avec une facilité déconcertante ? La situation est préoccupante et doit interpeller. De deux choses l’une. Ou les agents et autorités portuaires sont complices et laissent faire ou ils ne font pas avec rigueur leur travail pour lequel ils sont rémunérés.

Cette affaire de drogue pose également la problématique de l’efficacité des services de renseignements togolais prompts à traquer les opposants ou à les mettre sur écoute à travers des logiciels ultrasophistiqués israéliens, mais montrent leurs limites quand il s’agit de démanteler des réseaux de trafics de drogue.

Médard Ametepe

Source : Liberté N° 3344 du 10 mars 2021