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« La reddition de comptes n’est pas de la persécution politique, c’est une exigence démocratique et constitutionnelle », Mireille Bertrand Lherisson

Les membres de la Cour des comptes seraient-ils devenus trop vieux pour assumer les tâches à eux dévolues ? Ou n’ont-ils pas d’exigences à remplir dans l’accomplissement de leurs missions ?

Pendant trop longtemps, cette institution s’est reposée sur ses lauriers, se contentant d’un service minimum. Certainement parce que n’étant pas mise sous pression. Si, comme l’a professé la Cheffe du gouvernement, Victoire Tomégah-Dogbé, l’heure est à la gouvernance autrement, ce nouveau paradigme devra s’appliquer d’abord aux institutions contrôle.

Tenez, mardi 4 mai 2021, nous avons jubilé quand il a été publié un rapport sur la gestion de la préfecture de Yoto. Mais grande fut notre surprise de découvrir qu’en réalité, les membres de la cour des comptes se sont gênés pour publier un rapport sur la période 2010-2015 en avril…2021. Soit six ans dans le meilleur des cas, et onze ans au pire.

Quand on sait que les élections municipales ont consacré une forme de décentralisation, et que les membres des délégations spéciales ont cessé d’être depuis bientôt trois ans, on se demande pourquoi tant d’énergie pour sortir un rapport dix ans ou six ans après. A moins que la gouvernance nouvelle formule veille donner l’impression de travailler alors qu’en réalité, il n’en serait rien.

Toutes choses étant égales par ailleurs, il devient donc loisible de déduire que la gestion des mairies actuelles sera programmée pour être auditée peut-être en…2029 ! Pitoyable pour une cour des comptes dont les membres sont rétribués par les contributions du contribuable.

A quoi peut être due cette façon de faire le suivi ? Certainement que les membres eux-mêmes trouveront des arguments pour justifier l’incompréhensible. Mais il se trouve que dans la constitution togolaise, l’article 107 dispose : « La Cour des comptes et les Cours régionales des comptes jugent les comptes des comptables publics. La Cour des comptes et les Cours régionales des comptes assurent la vérification des comptes et de la gestion des établissements publics et des entreprises publiques. Les Cours régionales des comptes sont chargées d’assurer, dans leur ressort territorial, le contrôle des comptes et la gestion des collectivités territoriales et leurs établissements publics. La Cour des comptes et les Cours régionales des comptes exercent les fonctions juridictionnelles en matière de discipline budgétaire et financière des ordonnateurs et des ordonnateurs délégués, des responsables de programmes, des contrôleurs financiers, des organes de gestion des marchés publics et des comptables publics. Elles sanctionnent, le cas échéant, les manquements aux règles qui régissent lesdites opérations. Elles assistent le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances. Elles procèdent à toutes études de finances et de comptabilité publiques qui leur sont demandées par le Gouvernement, l’Assemblée nationale, le Sénat ou le Conseil économique et social. La Cour des comptes établit un rapport annuel de ses activités et de celles des Cours régionales, adressé au Président de la République, au Gouvernement et à l’Assemblée nationale et dans lequel elle fait état, s’il y a lieu, des infractions commises, des responsabilités encourues et de ses recommandations ».

Serait-ce parce qu’il n’existe pas de deadline ni de périodicité pour les rapports que les membres de l’institution en font à leur guise ? Lorsqu’on parcourt le rapport, on est tenté de se demander : « tout ce temps pour ça » ?

Le Togo compte 37 préfectures. A l’allure où avancent la production des rapports, on est en droit de se demander s’il arrivera un moment où la cour des comptes pourrait produire de rapports un an après la fin d’un exercice, histoire de permettre à ceux qui étaient aux affaires lors du contrôle, de se justifier.

Mais laisser s’écouler cinq ans, voire dix ans avant de produire un rapport d’une préfecture, à quoi cela servira si ce n’est de donner l’impression qu’on travaille ? On attend alors le prochain rapport pour juger du « décalage annuel » !

Godson Ketomagnan

Source : Liberté / libertetogo.info