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Faure Gnassingbé et Victoire Tomegah Dogbé | Photo : DR

Lorsque le président fadement reélu fait fi de l’esprit d’ouverture et va sortir un Premier Ministre de sa garde-robe, il est conforme à sa politique : recycler la primature avec les cerveaux malades qui font allégeance à ses envies. Victoire Dogbé incarne le même mal, sous un autre nom. Elle fait partie du culte et ne peut apporter aucun souffle nouveau, aucune idée novatrice à un système bloqué, figé dans l’immobilisme. Tout au plus, une commise de l’état soumise, convoyeuse de parapheurs, qui va avaler sans rechigner les grosses couleuvres des casernes, multipliant les «Oui Tonton» et les «Oui mon général» à longueur des jours. Son devancier, Sélom Klassou, n’a été que ça : l’ombre de lui-même pendant 5 ans, sans splendeurs ni résultats. Il sont une douzaine de PM’s depuis Août 1991. Chacun avec ses déboires et cauchemars. Tous ou presque, manœuvrés comme des pions au reversi, nous renvoyant à la dynastie des Shang et Zhou de la Chine ancienne. Victoire Dogbé à la primature, c’est une des drôleries ordinaires de chez nous ! Les Togolais vont-ils finir par agir sur l’avenir en prenant les choses en main ou bien sont ils victimes de la fatalité?

Par Kodjo Epou

Pour avoir raté, en 2005, un tournant décisif de son histoire, le Togo s’est retrouvé avec une autorité frappée de caducité, issue d’une majorité de contre-bande, avec des lois qui portent un masque, statuant une chose tout en faisant une autre. Sans la moindre trace du peuple dans l’autorité qui la dirige, la République, notre république, après avoir longtemps vagabonder, maintenant plonge. Ainsi, les scandales en tout genre – le choix de Dogbé en est un – se poursuivent, s’accumulent, s’enchevêtrent, sans qu’on voit venir les signes d’une remise en ordre de l’Etat: avec un gouvernement de copains, de parents, d’amis, adossé à une armée carabinée, les Togolais semblent pris dans un ouragan. Tous attendent, dans l’angoisse, une éclaircie salvatrice, malheureusement, qui relève des impossibles, alors que l’Etat grince d’agacement et veut entrer dans l’air du temps. Victoire Dogbé, la préférée en lieu et place d’une personnalité de poigne, d’un érudit en négociations, au regard des urgences, c’est la solution du pire, le comble pour un pays en crise qui stagne! Que faut-il pour sortir de l’engrenage? Un avenir, cela se veut, cela se façonne. Il revient au peuple, enfin, de faire le pari, sans promesses piégées, que les larmes du présent fécondent l’avenir. A défaut, point de salut!

C’est d’une refondation intégrale que le pays a besoin, une condition absolue si l’on veut que le pouvoir d’Etat cesse d’être un scélérat assemblage de frénétique corruption et de braderie crasse sur fond d’une gouvernance à l’état misérable. Faure a un problème; ce n’est pas son opposition; c’est lui-même. Comme il n’est pas assez mature pour conduire le troupeau, il fuit vers le danger avec toutes les richesses du pâturage. Quand le bazard est en ruine – ce qui est le cas – et que les urgences se bousculent, seule une planche de salut portée par un gouvernement de mission peut remettre le pays sur pied. Ce n’est point la désignation d’une femme du sérail comme premier ministre qui apportera la solution aux nombreux problèmes qu’affronte le Togo. Une transition est à refaire, c’est le passage obligé si l’on veut sortir de la marche sans but précis, une errance sourde devenue la marque de prédilection du pays.

Le chemin a été long, semé d’embûches mais aussi de trahisons. Aussi le Togolais a-t-il pris goût de regarder son histoire par rapport à son ventre, à l’argent, au matériel et à son ethnie. Un regard oblique qui, pendant trop longtemps, empêche le pays de solder ses dettes contractées avec l’histoire. L’autocrate le sachant, il a pris goût de jouer avec le destin du peuple. Que de ressentiments étouffés dans le sang et dans les larmes! Que de colères contenues devant tant de désinvolture à l’égard d’un mal si profond, si atroce! Un arrêt obligatoire s’impose. Il faut à notre pays une boussole qui permet de repérer le bon chemin vers l’équilibre. Ce qui revient à dire qu’espérer un changement automatique sans un combat libérateur, c’est laisser libre cours à l’assoupissement actuel que nous observons. Reste qu’il faut désormais garder à l’esprit que le pouvoir, sous une autocratie, ne se transmet pas sans confrontation ni véritable combat.

Faure Gbassingbé ayant fini de dérouler son taux d’incapacités, seule la colère populaire, aux quatre coins du pays, tel un violent raz-de-marée, peut ouvrir de force les portes d’une transition destinée à aplanir les différends, à dénouer une fois pour toute le statu quo. Ce «turning point» est immuable et la situation de pourrissement l’impose. Le pouvoir n’offrira pas une transition sur un plateau d’argent. L’idée n’a pas de quoi plaire à cette frange qui tient notre peuple en joue et que le statu quo enrichit. C’est pour elle synonyme de bouleversement. La crainte d’un vide institutional qu’engendrerait la recherche d’une alternative transitoire ne devrait pas, à ce stade de déliquescence, avoir de résonance, si l’on se fie aux revendications du peuple transformées en rages et en hurlements de douleurs à cause de la misère. Aussi longtemps que le Togo se refusera cette parenthèse charnière qui solde sa fiévreuse histoire tourmentée, le pays n’accédera pas à l’ère nouvelle qui devrait profiter à tous ses enfants; Au contraire, il restera le pays errant, isolé et perdu qu’il est depuis Février 2005. Autrement, avant que ce pays-là n’espère devenir un état stable et attrayant, un bastion de justice, de prospérité et de démocratie, une concertation nationale reste le passage obligé, loin des intérêts partisans.

C’est cette période, elle seule, qui peut débloquer l’horizon, recréer l’espoir; c’est elle qui peut faire revenir l’enthousiasme, favoriser l’exercice du Grand Pardon dont l’aboutissement, le paroxysme, pourront concrétiser la réconciliation nationale devenue chez nous un serpent de mer. La renaissance économique, l’émergence de l’éthique et de la morale, qui échappent tant à notre pays sont à ce prix.Tout le monde, sans exclusive aucune, devra prendre part à ce schéma salvateur. Le Togo peut encore s’en sortir et, peut-être, surprendre le monde. Mais seulement à une condition, unique: que Faure Gnassingbé qui n’est ni un rassembleur ni un bâtisseur se comporte au moins en adulte à la présidence pendant qu’il y est; qu’il rassemble toutes ses forces et, avec humilité, descende de son piédestal car – n’y allons pas par quatre chemins – le problème du Togo, à ce jour, c’est lui, c’est sa famille, c’est le parti dont il est le leader.et pourtant il nous est appris une leçon de morale: il ne sert à rien de gagner une guerre et, après, se contenter de jouir de sa Victoire sans être en mesure de faire la paix avec ceux qu’on prétend avoir vaincus!

Kodjo Epou
Washington DC
USA

Antoine Kodjo Epou
Kodjo Epou