Victoire Tomegah Dogbé
Victoire Tomegah Dogbé, Lomé, 18 août 2017 | Photo : aLome.com

«Le changement est la loi de la vie humaine, il ne faut pas en avoir peur» (Jacques Chirac)

Le Premier ministre s’est prêté à l’exercice bilan de ses 100 jours à la tête du gouvernement. Dans une émission spéciale sur la Télévision nationale, Victoire-Tomegah Dogbé est revenue sur la politique sanitaire contre la pandémie de la Covid-19 ainsi que les projets mis en œuvre au profit des populations dans le cadre de ce qu’elle appelle la « Gouvernance concertée ». Les 100 jours ont été aussi marqués par des visites et suivi de chantiers.

Si l’initiative en soi est louable, fondamentalement rien n’a changé dans la manière de gouverner. Le pays est toujours confronté à une crise managériale. Les Togolais n’ont été autant éprouvés que sous dame Victoire Tomegah-Dogbé pour ses débuts. C’est sous son magistère, ne l’oublions pas, que Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson et Gerard Djossou, responsables de la Dynamique Monseigneur Kpodzro ont été arrêtés et ont passé plusieurs semaines en détention pour un complot imaginaire.

Depuis plusieurs mois, des dizaines de prisonniers politiques innocents et incarcérés arbitrairement, continuent de croupir dans les geôles de la dictature. Le gouvernement de Victoire s’est systématiquement opposé à leur libération.

Par ailleurs, la crise de Covid-19 et des menaces sécuritaires servent de prétexte pour restreindre drastiquement les libertés publiques dans le pays. Le Togo est devenu la Corée du Nord où les moyens d’expression républicains n’existent plus. Cette forte restriction des libertés publiques donne l’impression que le pays va bien au regard des apparences de quiétude et de tranquillité qu’il affiche, signe en fait de la lassitude des Togolais. Ce n’est guère bon signe pour un pays. Mais plutôt une «bombe à retardement» qui pétera au nez à la première occasion. Comme le rappelle Didier Court, «l’injustice appelle la révolte, le contournement des lois. C’est un environnement instable qui conduit au chaos ».

Parallèment, la liberté d’expression est remise en cause. Plusieurs médias sont dans le collimateur du régime. S’ils ne sont pas sanctionnés ou ne subissent pas des condamnations judiciaires, ces médias sont carrément interdits de parution. Le dernier cas concerne « L’Indépendant Express » dont le retrait du récépissé a été ordonné par la justice après que le premier responsable a été arrêté manu militari et malmené par le SCRIC, la police politique de Faure Gnassingbé. Justement, la justice, dernier rempart qui assure la cohésion sociale, ne cesse de s’illustrer négativement.

Il faut rassurer les Togolais par des actes forts qu’on veut véritablement gouverner autrement. Mais après plus de trois mois à la tête du gouvernement, on ne voit aucun changement notable. Il est illusoire de penser qu’on peut libérer le potentiel-énergie et imprimer une nouvelle dynamique au pays, si sur le plan politique, c’est toujours le statu quo. Madame la cheffe du gouvernement doit savoir que tout est intimement lié et que la politique est consubstantielle à tous les autres domaines. Elle est la locomotive qui tire les wagons. Quand ça stagne sur le plan politique par la mauvaise foi des dirigeants, les agitations et les gesticulations du Premier ministre seront stériles.

On a eu l’exemple palpable avec son ancien patron Gilbert Fossoun Houngbo qui, malgré ses compétences, sa bonne volonté et sa détermination à tout aloi à changer les choses, à faire bouger les lignes, il a été plutôt avachi et désillusionné. Ce cas illustre à perfection que le régime en place depuis 54 ans se complait dans l’apathie, un régime sclérosé et enkylosé.

Médard Ametepe

Source : Liberté