attention aux tontines en ligne
Infog : 27avril.com

Les techniques de l’information et de la communication ont bouleversé la vie de l’Homme dans plusieurs domaines. Si, elles ont, du moins, simplifié considérablement les choses dans ses activités, les techniques de fraudes ou d’arnaque sont, aussi, beaucoup plus taillées, souvent à la hauteur du changement. Plus ce changement ou cette évolution est grand, plus, le risque est élevé. Ainsi est né le terme de la « cybercriminalité ». Cela a pris beaucoup d’ampleur et touche aujourd’hui plus aussi les réseaux sociaux qui deviennent un canal pour des individus mal intentionnés de jouer sur la naïveté ou l’ignorance de quelques-uns pour atteindre leur but. Une autre forme de tontine, souvent transformée en arnaque à la fin, est apparu ces dernières années dans les sociétés africaines. Les tontines traditionnelles de collecte d’épargne cèdent peu à peu la place à une autre forme de tontine qui est beaucoup plus virtuelle.

Cette tontine qui se faisait avant entre amis ou entre membres d’une même famille ou encore dans le cadre professionnel s’est transportée sur les réseaux sociaux.

« On fait un groupe de 10 ou 20 personnes vivant dans le même quartier ou dans la même maison. Parfois c’est dans le cadre professionnel, c’est-à-dire entre vendeurs dans le même marché ou des travailleurs dans un même service. On fixe une somme que chacun doit donner par semaine ou par jour et à la fin de chaque semaine, un membre prend la totalité de la somme récoltée dans la semaine. Ainsi de suite jusqu’à ce que tous les membres aient leurs sous. Des tontines durent parfois un an selon le nombre de personnes qui y participent », a expliqué un initiateur de tontine traditionnelle à Lomé.

« Tontine pour achat de denrées alimentaires » ; « tontine pour achat d’ustensiles de cuisines », 1200/semaine ; « tontine pour achats de chaussures dames et autres » ; « tontine pour achat de Wax hollandais ou Bazin », 5000 FCFA/semaine etc. C’est des noms de groupes qu’on peut voir un peu partout aujourd’hui parmi les multitudes de groupes WhatsApp qui existent. Ces liens de groupe sont partagés sur la plateforme pour permettre une forte adhésion à ces tontines.

« C’est un groupe comme tout autre groupe de Whatsapp mais spécialement destiné à la tontine. Les liens de ce groupe peuvent être envoyés aux amis, des membres de notre famille. Parfois même des gens qu’on ne connaisse même pas adhèrent au groupe. Il suffit que la personne accepte les conditions du groupe », a expliqué Mlle Bernice, revendeuse au marché d’Attikpodji dans le quartier Beniglanto à Lomé et initiatrice d’une tontine d’achat de denrée alimentaire sur WhatsApp.

Par rapport à la tontine elle-même ; Mlle Bernice explique qu’elle a créé un groupe de 10 personnes maximum et chaque membre doit cotiser 1100 FCFA par semaine. Au plus tard chaque samedi soir, tous les membres doivent envoyer l’argent et signifier cela sur la plateforme. La personne qui doit prendre sa part, la semaine-là, prend les denrées alimentaires préalablement retenus au début de la tontine, le jour suivant, c’est-à-dire le dimanche. Toute la phase de collecte des épargnes se fait par Mobile Money. Elle précise que le quota de la tontine est à 1000 FCFA mais que les 100 Frs restants sont pour l’initiatrice de la tontine.

« Grâce aux tontines en ligne auxquelles je participe je n’ai plus de manque de denrées alimentaires dans ma chambre et j’ai pu m’acheter également des chaussures et des colliers. Si une est sur le point de finir, j’adhère à un autre groupe. Cela m’a permis d’acheter plusieurs choses en même temps en cotisant 1100 frs ou 2200 frs par semaine », a expliqué Rose, comptable dans une PME de Lomé.

Rose souligne que ces tontines sont pour la plupart destinées à l’achat d’une chose qu’on a retenu dès la création du groupe et non à autres choses. Parfois aussi on trouve des tontines virtuelles à ramasser en espèce, c’est très rare mais ça existe. Par exemple des groupes de « tontine pour 100.000 à ramasser par semaine » et autres ».

Beaucoup aussi ont eu satisfaction dans cette tontine virtuelle qui leur permet d’acheter tous ceux dont ils ont besoin. Si ces tontines ont permis à certains de s’acheter de petits trucs, d’autres ont misé gros et ont eu gain de cause.

Kodjo par exemple, mécanicien peintre auto au Port Autonome de Lomé explique qu’avec cette tontine virtuelle, il s’est acheté un petit terrain pour la construction à Zanguéra, au nord-ouest de Lomé.

« Au début je e demandais si ça va aboutir mais ce qui m’a donné espoir, c’est que nous sommes tous des amis responsables exerçant dans diverses activités. Nous étions 20 personnes dans le groupe ayant la capacité de donner 30.000 FCFA par semaine. Donc il m’a fallu 20 semaines pour m’acheter ce terrain. Dans notre groupe, les responsables du groupe t’achètent le terrain avec tous les papiers et te les remettent avec visite du terrain », a-t-il précisé.

Si chez ces personnes la tontine virtuelle a porté ces fruits, il n’en est pas de même chez plusieurs autres personnes qui en ont gardé de très mauvais souvenirs. Cette initiative qui n’est pas mauvais en soi avec l’avènement des TICs tourne de plus en plus vers l’arnaque. Une initiative très risquée avec une fin incertaine pour certains ou un réseau d’arnaqueurs sur les réseaux sociaux pour d’autres. D’autres préfèrent la tontine traditionnelle qui se faisait entre membre d’une même famille ou dans le cadre socioprofessionnel. Même s’il y a des risques dans ça aussi, ils sont moins élevés que pour la tontine virtuelle.

« Moi, j’avais intégré une de ces initiatives. Et pour nous c’était pour l’achat des ustensiles de cuisine. Nous sommes au total 10 femmes dans le groupe. On cotisait 3300 FCFA par semaine. Cela avait bien commencé, 5 ou 6 personnes avaient déjà eu leur part et on se disait que ça allait bien se passer comme des gens ont déjà commencé par recevoir leurs ustensiles de cuisine. Après ces 3 personnes y compris l’initiatrice de la tontine, plus aucune nouvelle. Nous autres, les 5 ou 4 personnes restantes n’avons pas eu notre part jusqu’à maintenant. Après on a appris que 3 personnes parmi ces gens, après avoir perçu leur part ne donnent plus aucune nouvelle. Malheureusement, je faisais partie des personnes restantes », a confié Mablé, assistante de direction à Lomé.

Certains, plus naïfs, entrent dans ces genres de groupe, sans connaitre un membre du groupe. Et ils l’ont payé à leur dépend. C’est le cas de ce jeune homme, vendeur de portables à Deckon, centre-ville de la ville de Lomé.

« J’ai vu le lien dans un groupe et j’y ai intégré. En fait c’est une tontine pour achat de Télé, ventilateur et autres trucs intéressants qu’on peut avoir dans sa chambre à raison de 1100 FCFA/jour. Etant jeune, je me suis intéressé. On était au moins 20 personnes dans le groupe. Quelques membres nous ont tellement mis en confiance que tu te dis, ça y est. Tu es dans de bonnes mains. Après 6 semaines certains ont perçu et ça nous a mis encore plus en confiance. Puisque quand ils prennent les télés et tout, ils témoignent dans le groupe et prennent des photos des appareils qu’ils envoient dans le groupe. Au tour de la 7ème personne, rien. Ils nous ont expliqué que c’est un retard. 8ème personne, encore rien. Ç’est là qu’on commençait par s’inquiéter. Et après aucune nouvelle. Nos sous sont perdus comme ça. Après on a appris que c’est un groupe d’individus qui ont organisé tout ça. C’était monté de toute pièce entre eux. En fait ceux qui ont témoigné qu’ils ont perçu aussi ne perçoivent rien mais ils font semblant pour nous mettre en confiance et nous motiver à continuer la tontine ».

Le pis dans tout ça, c’est que cette tontine échappe totalement au contrôle de la police. Au moins pour la tontine traditionnelle, s’il y a ces genres de problème, les membres connaissent la personne chez qui ils laissent les sous et peuvent le convoquer en tout temps sauf si elle disparait. Mais dans ce cas de tontine virtuelle, il est difficile de retracer ces personnes ou de les convoquer à la police. Si la tontine aboutit normalement tant mieux, mais dans le cas contraire les victimes en paient les frais sans avoir la possibilité de convoquer ces individus véreux.

Il est donc nécessaire que chacun prenne la mesure des choses et soit clément envers ces groupes de tontines qui finissent pour la plupart très mal. En plus, il y a plein de microfinances aujourd’hui. Même si elles aussi ne sont pas totalement sûres, on en connait qui se sont volatilisés dans la nature avec des milliards, mais il serait toujours raisonnable de se confier à une microfinance reconnue par l’Etat pour ses épargnes que de se laisser gruger par un individu sur les réseaux sociaux.

Caelys J.

Source : Le Tonnerre