Caricature : Donisen Donald / Liberté

Ils seront nombreux à grincer des dents. Le clap de fin arrive bientôt pour ceux des magistrats qui se croyaient inamovibles. Mais d’autres également seront soulagés de constater qu’enfin, le ministre la Justice et le président de la Cour suprême auront fait ce qu’ils devraient faire depuis des années. On apprend que, n’eurent été les assises, le vaste mouvement au sein de la magistrature aurait été consommé. Mais qu’à cela ne tienne, tout serait bouclé, et au sortir des assises, nombreux sont ceux et celles -qui n’ont que trop duré à leurs postes- qui seront dévissés et envoyer ailleurs.

Se pourrait-il que les affectations tant attendues de la part du duo Pius Agbetomey-Abdoulaye Yaya ne se fassent pas non plus pendant ces vacances scolaires ? Cette probabilité n’a plus sa raison d’être. Selon les informations de sources, tout serait bouclé et on n’attendrait que la fin des assises en cours à la Cour d’appel de Lomé pour enclencher le processus.

La dernière fois qu’un mouvement au sein de la magistrature a recueilli l’assentiment de la majorité des magistrats, c’était il y a 9 ans, en 2012. En ce temps, nombreux étaient ceux qui pensaient que le corps judiciaire allait retrouver ses lettres de noblesse. Et les premières années avaient laissé croire à ce renouveau. Mais l’embellie n’a pas duré longtemps.

Quatre ans après, soit en 2016, les grincements de dents avaient commencé. Et lorsqu’on ose dresser un bilan sur la moralité de chaque magistrat pris individuellement, sur les actes qu’il a posés à son poste, lorsqu’on interroge la hiérarchie sur les leçons à tirer du laisser-aller qui s’est installé au sein de ce corps, il n’y a pas grand motif de fierté à en tirer.

Certes, des magistrats consciencieux et soucieux du droit, la justice togolaise en compte. Des juges qui s’efforcent de ne se laisser guider que par les faits et la déontologie du métier, on en trouve à profusion. Mais ceux-ci sont-ils récompensés par la hiérarchie ? Leurs efforts quotidiens sont-ils à la hauteur de la reconnaissance qu’ils devraient recevoir ? Chacun peut juger.

De la même façon, malheureusement, ceux des magistrats guidés d’abord par le gain facile, la torture morale et psychologique à infliger au justiciable, le souci de se réaliser vite et en un temps record, l’illusion de se considérer comme « puissants » ou « indispensables », sont nombreux au sein de la magistrature togolaise. Et ce dernier groupe n’a pas donné une bonne image de la justice togolaise. Tant et si souvent que des justiciables ont une perception médiocre de ce corps.

Dans cette situation, on se demande à ce jour pourquoi la HAPLUCIA (Haute autorité pour la prévention et la lutte contre la corruption et les infractions assimilées) avait tenté de se dédire après la sortie de son rapport sur la perception de la corruption au sein de la population togolaise.

Parmi les groupes hautement « corruptogènes », figurait en bonne place la justice. Du fait des magistrats véreux qui n’ont que trop longtemps écumé les tribunaux et occupé les postes qui requéraient probité, diligence, promptitude, humilité.

Que de dossiers sur lesquels des juges sont « assis » au sein des tribunaux ! Que de soupirs de déception des justiciables n’ont pas poussé à l’issue de procès dont l’issue sautait aux yeux, mais dont des juges, poussés par on ne sait quel dessein, ont tordu l’épilogue ! Tant et si souvent qu’au sein de la population, il est devenu courant d’entendre dire : « notre justice là, humm ! », « mon ami, il vaut mieux ne jamais avoir affaire avec la justice togolaise », et d’autres impressions toutes plus désolantes les unes que les autres.

Les travaux des organisations de la société civile, de la Commission nationale des droits de l’homme et des médias ont exposé les tares tant dans les prisons que dans les tribunaux. Des tares imputables à des juges cupides et rapaces. Heureusement que tous ne portent pas cet habit. Mais malheureusement que les vertueux sont peu visibles, les peu recommandables leur ayant fait ombrage pendant trop longtemps.

Dans quelques semaines, le nouveau président de la Cour suprême subira son vrai premier baptême de feu. Ensemble avec le ministre de la Justice Pius Agbetomey, leur décision d’affectation sera scrutée à la loupe ; aucun poste ne devra plus souffrir de l’omniprésence de magistrats ayant déjà fait leur temps, mais qui devront encore prolonger leur bail, comme s’ils ou elles étaient assis sur du chewing-gum.

De Cinkassé à Lomé, tout devrait bouger. Fini le temps des juges superpuissants qui terrorisent les justiciables et donnent l’impression de disposer du droit de vie et de liberté sur les citoyens.

On l’avait dénoncé à maintes reprises, des juges et magistrats qui font 7, 8, 9ans au même poste sont sujets à la corruption. Et ils finissent par prendre des libertés, tisser des liens incestueux et se considèrent comme ayant un plan de carrière ; ce qu’a réfuté le ministre.

Godson K.

Source : Liberté N°3431 du Vendredi 23 Juillet 2021