Dans la nuit de mercredi 6 à jeudi 7 février 2019, vers 2h30, un jeune migrant a été repéré par un chauffeur routier italien qui circulait sur la RN 94 dans les Hautes-Alpes. Le jeune homme, identifié plus tard comme un Togolais de 28 ans, gisait inanimé sur un chemin forestier qui longe le torrent des Vallons, juste à côté de l’aire de chaînage de La Vachette, sur la commune de Val-des-Prés, entre Montgenèvre et Briançon près de la frontière italienne. Le jeune migrant, qui n’a jamais pu atteindre Briançon, après avoir traversé à pied la frontière entre l’Italie et France, s’appellerait Dermane Tamimou d’après certaines sources.

Dans un communiqué, le Procureur de la République de Gap, Raphaël Balland, relate les faits

« à compter de 2 h 10, les secours et les forces de l’ordre étaient informés de la présence d’un groupe de présumés migrants qui était en difficulté entre Clavière (Italie) et Briançon. Des policiers de la police aux frontières (PAF) partaient alors en patrouille pour tenter de les localiser et retrouvaient vers 3 heures à Val-des-Prés, au bord de la RN94, un homme de type africain inconscient auprès duquel s’était arrêté un chauffeur routier italien.

En arrêt cardio-respiratoire, inanimée, en hypothermie, la victime a été massée sur place. Mais les soins prodigués par le médecin du Samu et les sapeurs-pompiers n’ont pas permis de la ranimer. Le décès du jeune migrant a été officiellement constaté à 4 heures du matin ce jeudi au centre hospitalier des Escartons de Briançon, où il avait été transporté en ambulance »

Parti avec un groupe d’autres migrants de Clavière, en Italie

« Les premiers éléments d’identification du jeune homme décédé permettent de s’orienter vers un Togolais âgé de 28 ans ayant précédemment résidé en Italie, détaillait encore Raphaël Balland hier soir. Selon des témoignages recueillis auprès d’autres migrants, il serait parti à pied de Clavière avec un groupe d’une dizaine d’hommes pour traverser la frontière pendant la nuit. Présentant des signes de grande fatigue, il était déposé auprès de la N94 par certains de ses compagnons de route qui semblent avoir été à l’origine de l’appel des secours.» précise le Procureur avant d’indiquer qu’une enquête a été ouverte pour «homicide involontaire et non-assistance à personne en péril» et confiée à la brigade de recherche de gendarmerie de Briançon, qui «poursuit ses investigations»

Mort d’hypothermie

Selon les résultats d’une autopsie pratiquée vendredi 8 février sur le corps, le jeune migrant Togolais serait mort d’hypothermie

« Dans le cadre de l’enquête recherchant les causes et les circonstances du décès du migrant décédé le 7 février 2019, une autopsie a été pratiquée ce jour par l’institut médico légal de Grenoble qui conclut à l’absence de lésion traumatique externe et à une probable mort par hypothermie », selon un communiqué du Procureur

« Le parquet de Gap a levé l’obstacle médico légal et le corps a été rapatrié à Briançon, le temps de confirmer l’identité du défunt et de tenter de contacter des membres de sa famille», poursuit le magistrat de Gap.

Rassemblement citoyen samedi 9 févier à Briançon

Dans un communiqué de presse, vendredi 8 février, plusieurs associations venant en aide ou prenant la défense des migrants notamment le collectif Tous migrants, Amnesty international, la Cimade, Médecins du Monde, Médecins sans frontières, le Secours catholiques et l’Anafé, ont réagit au décès tragique du jeune togolais

« Un drame qui alerte nos associations qui, depuis plus de deux ans, ne cessent de constater et de dénoncer les violations des droits de la part des autorités françaises à la frontière : renvois systématiques en Italie au mépris du droit, courses-poursuites, refus de prise en charge y compris des plus vulnérables. Ces pratiques poussent les personnes migrantes à prendre toujours plus de risques, comme celui de traverser par des sentiers enneigés, de nuit, en altitude, par des températures négatives, sans matériel adéquat (…) Alors que les ministres de l’intérieur de l’Union européenne se sont réunis à Bucarest pour définir une réforme du régime de l’asile et des politiques migratoires, nos associations demandent le respect des droits fondamentaux des personnes réfugiés et migrantes pour que cessent, entre autres, les drames aux frontières ».

Pour que personne n’oublie le jeune migrant togolais, et afin de dénoncer la politique d’immigration, ces associations et collectifs ont voulu attirer l’attention sur ce drame et se sont réunis, samedi après-midi, au Champ de Mars, à Briançon avec l’appui des associations et collectifs locaux, Tous Migrants, Refuges solidaires, la paroisse de Briançon, la Mappemonde et la MJC, l’Association nationale des villes et territoires accueillants.

Ils sont une centaine de personnes à rendre hommage au jeune migrant togolais décédé « Ce qui est impensable, aujourd’hui, ce sont ces hommes et ces femmes dans le besoin, qui viennent chercher de la protection, et meurent sur nos routes», regrette un maraudeur. «Il aurait eu 1000 occasions de mourir avant. Ici, aujourd’hui, ce ne sont pas des pro ou anti-migrants, juste des personnes qui ont envie de protéger d’autres êtres humains.»

Déjà en décembre dernier, plusieurs de ces associations caritatives, qui dénonçaient «l’insuffisance de prise en charge» des migrants qui tentent de franchir la frontière franco-italienne vers Briançon, avaient dit leur crainte de nouveaux morts cet hiver. La mort du jeune togolais leur aurait donné raison.

Source : 27avril.com + Le Dauphine + France 3